De mauvaises nouvelles

Malgré cette audacieuse stratégie, le bilan du PDG est contesté. En quatre ans, la capitalisation boursière de l’entreprise a été divisée par trois et Barnes & Noble a perdu 32 millions de dollars au 4ème trimestre 2010. Ron Burkle, qui détient 19 % du capital de la chaîne, voit alors dans la mauvaise gestion de Léonard Riggio la raison principale de ce déclin. Il aurait en effet échoué à adapter Barnes & Noble aux enjeux de l’édition numérique. La justice est saisie au cours de l’été : il faut vendre Barnes & Noble au plus offrant ou, mieux, changer de direction. Mais le 28 septembre, Léonard Riggio reprend la main et défait Ron Burkle, accusé de vouloir brader l’entreprise à Aletheia Research pour laquelle il a travaillé. Le
leadership de Léonard Riggio est maintenu mais fragilisé. Il devra accélérer la conversion numérique de l’entreprise.
Les actionnaires ont en effet fixé, le 28 septembre, lors du maintien de Léonard Riggio face à Ron Burkle, de nouvelles exigences. D’ici 2014, Barnes & Noble devra générer un chiffre d’affaires de 9 milliards de dollars, contre les 7 milliards actuels, et hisser sa part de marché dans le domaine des e-Books à 25 % (elle est aujourd’hui à 20 % aux États-Unis). Pour parvenir à ces résultats ambitieux, l’entreprise bénéficie d’un investissement de 140 millions de dollars dans son programme numérique.
C’est probablement l’ultime solution du groupe. Car si les ventes d’e-Books augmentent régulièrement (+ 42 % en un an), celles du papier diminuent progressivement (- 5 % de 2008 à 2009). Pour inverser durablement la tendance, il faut fournir aux utilisateurs un catalogue bien fourni. Or, celui de Barnes & Noble ne compte que 50 000 livres numériques payants, contre 700 000 pour Amazon.
Face à ce géant, Barnes & Noble possède cependant une arme : ses points de vente, sa présence physique sur tout le territoire. Son Nook est peut-être secondaire, il ne sert sans doute qu’à assurer la vente de livres numériques et à promouvoir le catalogue, mais c’est aussi un lien physique, affectif, avec le public. Et les magasins du groupe permettent d'aller à sa rencontre. Le New York Times annonçait ainsi pendant l’été un dispositif de rentrée important assuré par la librairie : 1000 stands, répartis dans ses centaines de boutiques, devraient prochainement accueillir les plus curieux ou critiques face à la lecture numérique. Convaincre est le mot d'ordre. Car pour William Lynch, nommé directeur général du groupe l’année dernière, « les consommateurs américains veulent essayer avant d’acheter » : il faut donc les guider et les conseiller.