Le cinéma brésilien représente un des marchés cinématographiques les plus importants d’Amérique latine aux côtés de celui de Cuba, du Mexique et d’Argentine. Des films comme Central do Brasil (Walter Salles, 1998), Cidade de Deus (Fernando Mereilles, 2002), Tropa de Elite (José Padilha, 2007), ou Linha de Passe (Walter Salles et Daniela Thomas, 2008), témoignent de la vitalité d’un cinéma qui se trouvait à l’agonie au début des années 1990 avec l’extinction notamment d’Embrafilme – organisme public de gestion, de production et de distribution cinématographique. En 2011, des années après la retomada – la reprise cinématographique – permise grâce à diverses lois sur l’audiovisuel et la création de l’ANCINE, de nouvelles questions se posent sur les limites du modèle économique qui sous-tend l’industrie cinématographique brésilienne. Totalement dépendant de finances publiques, marqué par une concentration régionale de la production doublée d’une concentration entrepreneuriale de la distribution, en concurrence déloyale avec le cinéma américain qui occupe 80 % des 2 500 salles du pays, le cinéma brésilien – aussi créatif soit-il – est-il capable de relever les défis qui se présentent aujourd’hui à lui dans son propre pays ?
Des fonds de financements publics gérés par le secteur privé
La nature de la participation de l’État dans le secteur cinématographique brésilien est le résultat d’un processus historique marqué, dans les dernières décennies du XXe siècle par deux événements majeurs : d’une part, l’extinction en 1990 du seul organisme de production et de distribution cinématographiques du Brésil, Embrafilme, ce qui a eu pour conséquence la mise à mort du cinéma brésilien. D’autre part, la reprise, ou retomada, de la production cinématographique brésilienne, notamment grâce à la création de lois d’incitation à la production et à l’investissement dans l’audiovisuel par le biais de dispositifs d’exonérations fiscales. À cela s’ajoute, en 2001, la création de l’Agence nationale du cinéma, ANCINE, organe officiel indépendant qui a pour objectif, au travers de la mise en œuvre de la politique nationale en matière d’incitation et de réglementation du secteur, de promouvoir la culture nationale par le biais du cinéma, de promouvoir la compétitivité du secteur au travers de la production, de la distribution et de la diffusion des œuvres ; d'encourager la diversification de la production régionale et indépendante, de favoriser la participation des œuvres nationales à l'étranger ; de contrôler la production réalisée avec des fonds publics ; d’avoir un rôle de conseiller technique et administratif auprès du Conseil supérieur du cinéma également créé en 2001. Depuis 2006, le FSA Fundo Setorial do Audiovisual (Fonds du secteur audiovisuel) a été créé comme branche spécifique du FNC, Fundo nacional de Cutura (Fonds national de la culture) permettant au ministère d’investir directement dans les projets audiovisuels.

Avant son extinction en mars 1990 par le président Collor, Embrafilme a distribué des classiques du cinéma brésilien tels que Le baiser de la femme araignée (Hector Rabenco, 1985), Bye Bye Brasil (Casa Diegues, 1979) ou encore Dona Flor et ses deux maris (Bruno Barreto, 1977).
Ces dispositifs ont porté leurs fruits au vu du nombre de films produits par an en constante augmentation depuis la retomada de 1994.
Néanmoins, une observation plus fine des mécanismes de production, de distribution et de diffusion des œuvres met en perspective certaines failles dans ce modèle de financement de la production cinématographique. De nombreuses questions se posent dont la principale est peut-être celle de la place exacte qu’occupe l’État dans ce modèle au regard de la provenance de l’argent investi par les entreprises.
Le financement du cinéma brésilien s’adosse à trois mécanismes distincts :
- Le FSA (financement direct de l’État) et autres dispositifs publics qui constituent la part minime du financement total ;
- Un dispositif d’exonération permettant aux entreprises d’investir une partie de leurs impôts sur le revenus dans l’audiovisuel afin de promouvoir leurs marques (Loi Rouanet, loi de l’audiovisuel) ;
- Un dispositif de fonds de financement par les entreprises au travers d’achats de certificats d'investissement (FUNCINES) permettant d’investir l’argent de bénéfices fiscaux en échange d'une participation aux résultats et de la promotion de leur marques.
 En 2010, environ 65 % du financement public du secteur audiovisuel provient précisément des mécanismes d’incitations fiscales via les lois de l’audiovisuel : articles 1 et 1A ; articles 3 et 3A, ainsi que l’article 39 X-MP2228-1, les Funcines et les Fonds de participation. Les 35 % restants sont constitués à 32 % de l’investissement direct du FSA et à 3 % d’autres ressources (provenant des États ou d’autres actions d’incitations directes d’entreprises publiques, de dispositifs ANCINE.
Ces mécanismes d’incitations fiscales illustrent à première vue une culture de sponsoring privé qui, selon Glauber Piva, directeur de l’ANCINE, pourrait s’expliquer par une forme de défiance historique vis-à-vis de l’État. Indéniablement ce système a créé des conditions d’investissements exceptionnelles. Entre 2002 et 2010, le montant de ces investissements a quasiment quintuplé.

Mais très concrètement ces mécanismes sont surtout ceux d’investissements privés de fonds publics, ce qui ne va pas sans poser problème car les exonérations fiscales se substituent à un système de financement public, un investissement direct de l’État, émanant d’une véritable politique culturelle. L’argent investi par les entreprises est de l’argent public, celui des impôts. En d’autres termes, l’argent public est investi, sans la moindre prise de risque, en marketing et en stratégie de communication au travers d’investissements cinématographiques. L’argent public ainsi distribué par les entreprises pour des projets que ces mêmes entreprises sélectionnent est de plus récupéré sous forme d’exonération, de communication et de retour sur investissement tout en induisant un lien entre production cinématographiques et retombées commerciales. Outre la question que pose cette gestion des fonds publics par le service de communication des entreprises, le fait que le cinéma brésilien soit entièrement dépendant de fonds publics est également problématique dans la mesure où ce système d'incitation fiscale décourage de vraies prises de risques de la part de véritables mécènes qui investiraient leurs fonds privés. En 2010, une nouvelle réforme de la loi Rouanet, loi Procultura – toujours appuyée sur des exonérations fiscales – tente de donner une plus grande marge de manœuvre au FNC, en en faisant l’organe central de financement du secteur culturel. Néanmoins, cette réforme ne réduit pas le gouffre existant entre les ressources fragiles du FNC et celles récupérées par le biais des lois d’exonérations.
Le cercle vicieux du financement de la production cinématographique
Cette politique d’investissement des entreprises – qui conditionne le profil de la production cinématographique brésilienne – crée une concentration des moyens financiers dans la région Sudeste, la plus riche du pays, là où les plus grandes entreprises sont présentes et investissent donc de façon plus importante. Les États de São Paulo et Rio de Janeiro, qui se trouvent dans cette région, concentrent également les plus importantes maisons de production. Le cercle vicieux d’investissement des entreprises les plus riches et de captation des investissements par les principales maisons de productions laisse ainsi peu de place à la diversité et crée des disparités régionales dès le processus de production cinématographique.


La région Sudeste - avec l’apport des entreprises de Rio de Janeiro et São Paulo – totalise à elle seule les 2/3 des principaux investissements dans le secteur. La conséquence immédiate de l’absence d’une politique culturelle de redistribution démocratique des investissements recueillis est l’inégalité dans laquelle se retrouvent les États et les régions en ce qui concerne la captation de ces investissements. Ainsi, selon les données ANCINE pour l’année 2009, plus de 93 % des investissements totaux recueillis pour le secteur audiovisuel a bénéficié aux projets portés par Rio (48,3 % du total) et São Paulo (45,2 % du total). En sachant que la production des films est dépendante, pour 2/3 de leurs financements, des investissements des États , nous comprenons aisément que près des 3/4 des productions brésiliennes – fictions et documentaires confondus – sont issues de l’axe Rio de Janeiro-São Paulo.

Comme nous l’avons indiqué, la concentration des moyens financiers se traduit également par celle des structures de production.Entre 1995 et 2009, sur l’ensemble des 225 maisons de productions répertoriées par l’ANCINE, dix d’entre elles (4,4 %) ont bénéficié de plus d’1/4 de la somme totale des investissements du secteur (27 %) qui s’élevait à 886 472 702,61 reais (soit environ 388,24 millions d’euros). Ces dix maisons de productions sont pour deux d’entre elles (HB films et 02 Produções) basées à Sao Paulo et pour les huit autres basées à Rio de Janeiro.
Lorsqu’on se limite aux cinq maisons les plus importantes (2,2 % du total des maisons de production) – toutes basées à Rio – on constate que celles-ci captent 20 % des investissements totaux du secteur
Ces structures sont celles qui produisent le plus de films et qui ont engrangé le plus de bénéfices. Sur l’ensemble des 440 films brésiliens produits entre 1995 et 2009, les 10 grandes maisons de productions ont produits 91 films (plus d’1/5 de la production nationale).


Lorsque l’on considère les cinq principales maisons de productions à l’aune du revenu financier qu’elles ont généré entre 1995 et 2009, une autre maison de production – également basée à Rio de Janeiro – fait son apparition à la 4ème place : il s’agit de Globo Filmes, le pendant cinématographique du conglomérat médiatique Organizaçoes Globo. Les lois d’incitation fiscale, excluant jusqu’en 2007 les entreprises de radio et télédiffusion nationales, Globo Filmes ne fait pas partie des grandes entreprises captant le plus d’investissements financiers. Mais la voici présente dans le quintet de tête des maisons de production qui, entre 1995 et 2009, ont généré 34 % du revenu total des 225 maisons de productions – soit 83 9973 116,65 reais (environ 369 millions d’euros – et qui ont produit, entre 1995 et 2009, 56 films (environ 14,5 % de la production totale) qui obtiennent près de 34 % des 130 973 837 spectateurs de l’ensemble des films brésiliens produits à cette époque. Dans ce quintet, la place occupée par Globo Filmes est très particulière. Arrivée sur le marché en 1997, elle institutionnalise les liens entre cinéma et télévision en développant une importante stratégie de coproduction avec d’autres maisons de production nationales, ce qui lui permet de contourner les restrictions imposées par les articles 1 et 2 de la loi sur l’audiovisuel. Et dans la coproduction, elle apporte bien davantage qu’un capital financier : c’est un immense espace de visibilité médiatique qui varie en fonction de la participation au contrat. Ainsi elle a participé indirectement à la production du film Cidade de Deus (Fernando Meireilles, 2002) grâce à un partenariat « médiatique » qui s’est engagé lors du lancement du film. Ce qu’apporte Globo dans la coproduction – divulgation et de valorisation publicitaire du film (télévision, magazines, radio, etc.) – est considérable. Pour l’année 2010, sur les 75 films sortis, elle totalise avec 9 films dans lesquels elle est présente (soit 11 % de la production nationale) 86,5 % du total des spectateurs pour l’ensemble des sorties nationales et 88 % du total des revenus.
Elle fut présente dans tous les plus grands succès du marché brésilien entre 2003 et 2010. Si Globo Filmes n’a pas participé à Tropa de Elite (José Padilha, 2007), elle fut en revanche associée à Tropa de Elite 2 (sortie 2010), grand succès de l’année 2010 avec plus de 11 millions de spectateurs.

La concentration des investissements financiers entre les mains de quelques grosses maisons de production a eu pour effet d’augmenter considérablement le coût moyen d’un film, et il est à noter que des stratégies de coproductions nationales – entre grosse structure de production et structure plus modeste - permettent parfois à certaines réalisations « indépendantes » et moins commerciales de voir le jour. Au niveau international, les coproductions représentent également la possibilité de bénéficier d’autres types de financement avec un enjeu important, celui de l’élargissement du marché avec une certaine visibilité à l’international. Depuis une dizaine d’années, le nombre de films brésiliens bénéficiant d’une coproduction étrangère ne cesse d’augmenter. Le Brésil possède actuellement des accords bilatéraux de coproduction avec l’Allemagne, l’Argentine, le Canada, le Chili, l’Espagne, la France, l’Italie, le Portugal et le Venezuela, en plus d’un accord multilatéral avec divers pays d’Amérique latine ( "Agreement Latin American Cinematographic Co-Production"). Les principales coproductions sont donc européennes - avec le Portugal en tête (39 coproductions sur 52 coproductions européennes) - et latino-américaine - avec le Chili en partenaire privilégié (14 coproductions sur 32 coproductions latino-américaines).


La distribution et la diffusion : la part des majors américaines et les défis structurels du cinéma brésilien
Le modèle de financement du cinéma brésilien se concentre presque essentiellement sur la production. La distribution et la diffusion des œuvres ainsi que la rénovation et l’entretien des infrastructures demeurent un autre des points faibles de ce modèle. L’article 3 de la loi de l’audiovisuel visant les entreprises étrangères imposables au Brésil a ainsi, tout en permettant la consolidation de la production brésilienne, largement avantagé les majors dans le secteur de la distribution – comprenant l’acquisition des droits de commercialisation, l’impression des copies et le travail de diffusion du film vers les différents marchés du films. Plus grandes, plus riches et plus structurées que les distributeurs indépendants nationaux, les majors, telles que Sony, Columbia, Disney, United International Pictures, Paramount, Warner, et 20th Century Fox raflent une grande part du marché en termes de nombre de spectateurs et donc de retours financiers.
En ce qui concerne la distribution des films brésiliens, nous assistons depuis quelques années à une évolution de la répartition de la distribution des titres. Si entre 2003 et 2007, la distribution des films brésiliens était très largement dominée par les majors, ce rapport s’inverse progressivement depuis 2008. Cette donnée est importante dans la mesure où les majors œuvrent prioritairement pour la distribution de leurs propres films américains sur le territoire brésilien – ce qui, au niveau national, réduit la durée d’exposition en salle des films brésiliens qu’elles distribuent afin de laisser la place libre et, au niveau international, freine les possibilités de visibilité de films brésiliens au profit d’autres productions plus rémunératrices.

Précisons toutefois que si les majors ont distribué en 2010 22,06 % des films brésiliens, ces films ont obtenu près de 40 % de l’ensemble des spectateurs. En position de force pour acquérir les droits des films les plus prometteurs, elles obtiennent en distribuant 30 films brésiliens présents dans les salles en 2010 plus de la moitié du public obtenu par les distributeurs indépendants ayant distribué 105 films brésiliens.
Le marché réserve néanmoins de belles surprises. Ainsi, l’année 2010 est marquée par le succès d’un distributeur national indépendant, Zazen, qui a réuni avec la distribution d’un unique film (Tropa de Elite 2, J. Padilha) 43 % de l’ensemble des spectateurs. Il fut le plus gros succès de l’année, films nationaux et internationaux confondus.
Ce succès 2010 reste exceptionnel. En effet, le cinéma brésilien peine à conquérir durablement et de façon importante son marché interne, un marché brésilien qui se caractérise, comme bon nombre de pays à travers le monde, par la domination du cinéma américain. Sa part de marché pour 2010 est de 19 %. Pour tenter de consolider et d’améliorer une part de marché en évolution depuis 2008, un récent décret fixe un nombre de jours obligatoires de diffusion d’œuvres nationales dans les salles de cinéma.



Avec une augmentation sensible du nombre de spectateurs des films brésiliens au Brésil, le marché cinématographique a rapporté 1,26 milliards de reais (environ 546 millions d’euros), ce qui représente une augmentation de 29 % par rapport à 2009. Si encourageant qu’il soit, il convient de rapporter ce chiffre à sa juste valeur. Selon une étude réalisée en 2007 par le ministère de la Culture, seuls 14 % de la population brésilienne va au cinéma ; 60 % des brésiliens n’y sont jamais allés. Ce qui signifie très clairement qu’au-delà d’une politique d’aide à la production culturelle, il s’agit maintenant de rendre accessible au plus grand nombre l’accès à la culture. Cet accès passe par exemple – mais pas seulement – par une déconcentration régionale de la culture.
En effet, outre le fait que le marché brésilien se caractérise par un nombre de salles insuffisant – avec une chute brutale dans les années 80 jusqu’à un creux de 1033 salles en 1995 et un chiffre qui aujourd’hui reste inférieur à ce qu’il était dans les années 70, celles-ci se trouvent elles aussi concentrées dans les États les plus riches du pays.


Les 2 206 salles du pays se répartissent ainsi de façon inégale sur le territoire brésilien, la région Sudeste disposant à elle seule des 3/5èmes des salles présentes sur le territoire brésilien. Dans cette région, les États de São Paulo (770 salles) et Rio de Janeiro (269 salles) concentrent à eux deux 81 % des salles de la région et 47 % de l’ensemble des salles du territoire brésilien. Notons également que 83 % des salles de cinéma (1 822) se trouvent dans des centres commerciaux et dans des multiplexes, ce qui entraîne une augmentation du coût du ticket de cinéma qui reste élevé au regard du pouvoir d’achat moyen au Brésil. Le prix du ticket avoisine 9,33 reais (soit environ 4 euros) pour un salaire minimum de 545 reais (soit environ 234,5 euros) correspondant à ce que gagne 56,8 % de la population brésilienne.
Qu’en est-il des autres segments ou marchés de diffusion des films ? À peine 25 % des recettes d’un film proviennent de sa sortie en salle. Le marché secondaire (télévision, vidéo, Internet, etc.) représente les 75 % restants. Si les salles de cinéma se concentrent pour plus de la moitié dans la région Sudeste et que de nombreuses municipalités brésiliennes ne disposent d’aucune salle en 2010, 94,7 % des foyers brésiliens disposent d’une télévision et les magasins de location vidéo sont présents dans 82 % des villes. Est-ce à dire que le cinéma brésilien a une plus grande visibilité ? Nous remarquons que ce marché secondaire lui assure – en particulier grâce à des chaînes thématiques – une forte présence sur les chaînes hertziennes (39,3 %) mais peu de visibilité sur les chaînes payantes, câble et satellite, Canal Brasil étant l’une des rares chaînes à diffuser des films brésiliens en assurant ainsi 18,31 % de la diffusion des productions nationales par rapport à l’ensemble des chaînes.


Quelle croissance pour le cinéma brésilien ?
Au regard de l’augmentation du nombre des sorties par année, de l’augmentation du nombre de spectateurs, des percées remarquées lors de festivals nationaux ou internationaux et de nouveaux accords de coproductions, nous pouvons considérer que depuis quelques années le cinéma brésilien vit une véritable embellie. L’année 2010 a ainsi été une année particulièrement fertile pour le cinéma brésilien avec, pour la première fois depuis 30 ans, un film national – Tropa de Elite 2 (J. Padilha) – qui bat tous les records d’audience et devance les blockbusters américains. Ce film et d’autres productions nationales de qualité contribuent à consolider le marché. Néanmoins de nombreux points faibles subsistent dans le modèle mis en place pour sortir l’industrie cinématographique du marasme dans lequel elle se trouvait au début des années 1990 : les productions qui dépendent à 100 % de remises gouvernementales fragilisent la diversité et découragent les prises de risques vis-à-vis de réalisations plus singulières. En outre, de nombreux projets obtenant des financements sont finalement abandonnés ou, une fois réalisés, ne sortent pas en salles ou sont mal distribués, le secteur de la distribution étant dominé par les majors étrangères qui sont donc en conflit d’intérêt dans la mesure où leur priorité reste la diffusion de leurs propres productions. De plus, le déficit de salles, qui se double d’une concentration régionale et d’une concentration des groupes détenant l'exploitation, fragilise également la visibilité du cinéma brésilien au Brésil. Les défis de l’industrie cinématographique brésilienne sont encore très nombreux. Au-delà même des réformes nécessaires des politiques actuelles de promotion et de financement du cinéma, le véritable enjeu du cinéma brésilien est d’être, dans les années à venir, plus accessible : aux producteurs, réalisateurs, distributeurs et acteurs quelle que soit leur région d’origine, et aux spectateurs de tout le pays quels que soient leur revenus. La croissance du cinéma brésilien nous semble tributaire, à terme, d’une volonté politique de garantir au plus grand nombre l’accès à la culture et de sauvegarder la diversité de la production en dehors des formatages commerciaux. Ce défi est, sans conteste, le plus important, le cinéma, en tant que production culturelle, participant à la construction de la mémoire d’un peuple et de son identité.
Données clés du cinéma brésilien 2010
- Nombre de sorties : 75 films
- Part de marché interne : 19 %
- Nombre de spectateurs : 25,6 millions
- Nombre de salles sur l'ensemble du territoire brésilien : 2 206
- Nombre de coproductions internationales : 25
- Revenus 2010 : environ 546 millions d'euros
Références
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Professeure à l'université catholique de Lille, vidéaste et plasticienne