Hollywood : de l’ancien modèle au nouveau
Lynda Obst dépeint l’évolution d’Hollywood, qui serait passé d’un vieux modèle qu’elle nomme « the old abnormal » à un nouveau, « the new abnormal ». Pourquoi ce modèle est-il resté anormal ? Tout simplement parce que les rapports professionnels et humains ont toujours été très codifiés à Hollywood, qui est un peu un monde à part.
Elle décrit d’abord l’ancien système par les caractéristiques suivantes : des décideurs qui pariaient sur des histoires ou des talents, un public majoritairement national – seulement 20 % des recettes étaient réalisées à l’étranger avant 2001 – et un marché des DVD à 50 % des recettes qui permettait grâce à sa stabilité de compenser la prise de risque des producteurs sur les projets.
Puis il y eut une période de transition, entre 2001 et 2008. Les studios ont investi sur de nouvelles techniques dans les domaines de l’animation et des effets spéciaux. Ils ont réorienté leur stratégie vers l’international, avec les coproductions et les ventes à l’étranger. Et surtout, cette période a vu naître une nouvelle forme de blockbusters : ces piquets de tente («
tentpoles »), nommés comme tels parce qu’ils doivent soutenir à eux seul l’ensemble des productions de l’année, rassemblent les franchises, les
reboot, les
sequel
et
prequel. Pour fortifier ces piquets de tente, les majors fabriquent des stars qu’ils utilisent à leur guise selon leurs besoins : dans le nouveau système, ce ne sont plus les talents qui imposent leurs règles. Cette analyse de Lynda Obst permet de nuancer celle d
’Anita Elberse pour qui les acteurs ont beaucoup de pouvoir face aux producteurs : en effet, un studio préfèrera un acteur moins connu à qui il donnera une certaine renommée (par exemple l’actrice Jennifer Lawrence dans la saga
Hunger Games).
Enfin, depuis 2008, le «
new abnormal » se caractérise d’abord par un effondrement des ventes de DVD à cause du téléchargement sur Internet. Par conséquent, le poids de l’international n’a fait qu’augmenter, atteignant 80 % des recettes en 2012, notamment grâce à l’essor de la Russie, de l’Inde et surtout de
la Chine qui s’est dotée de nombreux multiplexes avec 3D et IMAX.
Contrairement au vieux système, les décideurs prennent de moins en moins de risque : on privilégie le potentiel marketing des scénarios sur leur qualité dramaturgique, on choisit toujours les mêmes talents et seuls quelques réalisateurs stars parviennent à produire des films innovants, mais en contrepartie de leur contribution à « des piquets de tente ». Sur ce point, l’auteure rejoint le point de vue d’Anita Elberse.