Longtemps méprisées comme des « sous-produits culturels », accusées d’être des agents de « décérébration » des masses avec Dallas en exemple canonique, les séries télévisées américaines sont considérées depuis une quinzaine d’années en France comme des « modèles », voire des chefs d’œuvre, face auxquels nos productions hexagonales font pâle figure, et dont il faudrait à tout prix s’inspirer pour « exister », ou même survivre, sur un marché audiovisuel de plus en plus globalisé. L’histoire de la programmation de ces fictions à épisodes, étrangères ou nationales, révèle parfaitement la relation complexe des Français, et plus particulièrement des dirigeants des chaînes de télévision, avec ces programmes de divertissement dont ils ne sauraient se passer tout en culpabilisant de les aimer autant.
En France la fiction audiovisuelle à épisodes a, dès le départ, été méprisée par les pionniers de la Radio Télévision Française
Les fictions françaises de la RTF se caractérisaient surtout par un grand soin accordé au sonMais les fictions françaises de la RTF se caractérisaient surtout par un grand soin accordé au son : génériques aisément reconnaissables, voix remarquables des acteurs (Jean Topart, Raymond Souplex), importance de la musique car les écrans étaient encore très petits et les défauts de l’image (grains, vibrations) fréquents, surtout dans les zones rurales. La différence était frappante avec les séries américaines et britanniques qui, à la même époque, remplissaient les grilles des jeudis et samedis après-midi dans le cadre d’émissions destinées à la jeunesse : les cascades et les combats de Hopalong Cassidy, Zorro, Ivanhoé et bien d’autres contrastaient avec un doublage souvent fait à la va-vite, par des acteurs au timbre très théâtral.
À partir de la deuxième moitié des années 1960, la qualité et la quantité des séries télévisées augmentent pour contrer la concurrence de RTL et TMCÀ partir de la deuxième moitié des années 1960, la télévision est devenue un média de masse en France, et la qualité et la quantité des séries télévisées augmentent pour contrer la concurrence de plus en plus nette de Radio-Télé-Luxembourg (RTL) et Télé-Monte-Carlo (TMC) dans l’Est et le Sud-Est de la France. Leurs grilles de programmes essentiellement composées de jeux et de séries anglo-saxonnes ont en effet séduits les ménages populaires, prêts à s’endetter sur plusieurs années pour avoir accès à ces programmes mais qui boudent les programmes élitistes des chaînes françaises. L’ORTF, avec désormais deux chaînes (1964), propose alors de plus en plus de fictions à épisodes à ses téléspectateurs, misant sur le divertissement : les séries historiques adaptées de romans populaires du XIXe siècle (Belphégor, D’Artagnan, Vidocq, Jacquou le Croquant) alternent en soirée avec des séries américaines comme Mission : Impossible, La Quatrième Dimension, Les Envahisseurs, etc. Avant le journal de 20h, des feuilletons ancrés dans le quotidien des Français (Janique Aimée, Allo police, L’homme du Picardie) font écho aux enquêtes sociales du Commissaire Maigret proposées en soirée.
Les années 1970 marque un « âge d’or » des séries françaises, qui deviennent de plus en plus ambitieuses et privilégient les fresques historiquesEn 1970, la diffusion de la saga historico-familiale britannique La dynastie des Forsyte est un immense succès et, profitant des revenus supplémentaires induits par l’autorisation de la publicité à l’antenne à partir de 1971, les séries françaises deviennent de plus en plus ambitieuses, privilégiant les fresques historiques. La famille Boussardel, Les gens de Mogador, Les Thibault, Les rois maudits, Le pain noir, Les Dames de la Côte, mais aussi Arsène Lupin, Les Brigades du Tigre, L’île mystérieuse, marquent une sorte d’âge d’or des séries françaises, qui soutiennent vaillamment la comparaison avec leurs concurrentes étrangères (toujours largement diffusées à l’antenne).
En 1981, la diffusion de Dallas sur TF1 lance un tout nouveau débat autour des qualités respectives des séries françaises et américainesMais à partir de janvier 1981, la diffusion de Dallas sur TF1 lance un tout nouveau débat autour des qualités respectives des séries françaises et américaines. Les intellectuels fustigent en masse « l’apologie de la vénalité et des mauvais sentiments »(2), tandis que le public se passionne pour les multiples rebondissements des aventures de la famille Ewing (de façon modérée toutefois puisque la série américaine rassemble 21 % du public le samedi soir, tandis que la française Médecins de nuit séduit 29 % des téléspectateurs en semaine). Quoi qu’il en soit, Dallas réveille le vieux complexe français face au « géant américain. » La spécialiste des médias Michèle Mattelart écrit dans la revue Réseaux en 1985 : « la fascination (sur laquelle joue d’ailleurs un marketing de la cherté, vantant les budgets mirobolants et les fabuleuses recettes réalisées en un temps record par les dernières surproductions US) est l’autre visage du complexe d’assisté que nous éprouvons en tant que ressortissants des Etats-providence nés du keynésianisme.
À la fin des années 1990, une véritable lutte pour la légitimation de ces objets culturels s’engage
Le contre-choc arrive au début des années 2000 avec la découverte des Sopranos et de 24 heures chrono
Cheap fakes, shallow fakes et autres montages trompeurs se répandent sur Internet, et ce sont même parfois les gouvernements qui les relaient. S’ils n’inquiètent pas les rédactions pour l’instant, ils pourraient représenter un défi pour les journalistes.
En 15 ans, Facebook est devenu l’arène centrale de l’espace public numérique, et Mark Zuckerberg, son patron, l’un des hommes les plus influents de la planète. Influent, mais controversé. Le média de masse le plus populaire accumule les scandales. Plongée dans les coulisses de cette mutation.