Toutefois, dans le cas de la presse, le recours à des tiers n’est pas un phénomène nouveau, la fourniture de contenus de presse s’appuie depuis longtemps sur les contributions de pigistes et autres free-lances aux statuts professionnels variés, allant des professionnels (y compris les agences et fournisseurs spécialisés) aux amateurs(6). Ce recours se justifiait tant par des raisons économiques (limiter les frais de personnel permanent) que par un souci de coller à certaines formes d’actualité notamment locale ou spécialisée (expertise). Il se justifie toujours, mais ses formes ont évolué dans le contexte de changements technologiques actuel. De surcroît, la presse a dû faire face à une grave crise de son modèle économique traditionnel au moment même où surgissait la vague numérique.
L’arrivée de l’Internet a révélé que les utilisateurs ne valorisaient pas autant que la presse le pensait les contenus les plus coûteux à produireL’arrivée de l’Internet et l’accès gratuit à l’information ont révélé que les utilisateurs ne valorisaient pas autant que la presse le pensait la partie analytique et les contenus édités les plus coûteux à produire. De plus, comme le notait Hal Varian, l’économiste en chef de Google(7), le monde en ligne reflète le monde hors ligne : l’information au sens strict est difficile à monétiser(8), à fortiori dans le cas d’une concurrence accrue et protéiforme.
La déferlante de contenus hétérogènes remet en question les valeurs traditionnelles de la presse tels que l’objectivité et l’autoritéEnfin, sur le plan des contenus, la déferlante de matériaux hétérogènes, même soumis à un contrôle éditorial dans le cadre d’un journalisme connecté, remet en question les valeurs traditionnelles de la presse tels que l’objectivité et l’autorité. Néanmoins, comme le souligne Charlie Beckett, les journalistes traditionnels ne présentaient pas moins une vision particulière de l’information, et ce à partir d’une base sociale plus restreinte.
Charlie BECKETT, The Value of Networked Journalism. Polis, London School of Economics, 2010.
Jean-Marie CHARON et Jacqueline PAPET (sous la direction de), Le journalisme en questions. Réponses internationales. Paris, L’Harmattan-INA Éditions, Les médias en actes, 2014.
Jean-Marie CHARON, Presse et numérique - L’invention d’un nouvel écosystème, Rapport à Madame la Ministre de la culture et de la communication, 2015.
Patrice FLICHY, Le sacre de l'amateur, Paris, Le Seuil, La république des idées, 2010.
Idate, IVIR, TNO, User-Created-Content: Supporting a participative Information Society. Study for the European Commission, 2008.
OECD, Participative Web and User-Created Content: Web 2.0, Wikis and Social Networking. Paris, OECD, 2007.
Jean-Paul SIMON, « User generated contents Users, community of users and firms: toward new sources of co-innovation? ». 2016. À paraître.
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Crédits photos :
I'm a mobile phone photographer, not a terrorist. Tomas / Flickr. Licence CC BY-NC-ND 2.0
Capture d'écran du site du quotidien Ouest-France pour recruter un correspondant local.
Capture d'écran de la page d'appel à témoins du site de BFM TV.
Regarder et commenter en direct, sur Twitch, une de ses anciennes émissions : un usage qui a le vent en poupe chez les streamers. En rejouant l'archive, ces « vidéos de réaction » permettent aux vidéastes et à leur communauté de mesurer ensemble le chemin parcouru, notamment sur des sujets de société.
Dans des récits de fait divers, des comptes-rendus d'audience, ou tout simplement pour protéger des sources, les journalistes modifient les identités des gens, choisissent des pseudonymes. Mais comment s’y prennent-ils ? Existe-t-il des règles ? L’anonymisation est-elle toujours tenable ?