La marchandisation internationale d’un entertainment décalé
Cette posture anti-Disney s’est imposée dans la sphère des loisirs avec la diversification large et réussie des imaginaires de DreamWorks. À l’image des autres majors américaines, ses activités ne se réduisent pas au septième art. Au contraire, elle a investi l’« économie-monde » de l’entertainment hollywoodien
Tout d’abord, la diffusion de cette culture hollywoodienne prend la forme de nombreux versionings, c’est-à-dire de la déclinaison du même contenu sur de nombreux supports avec les activités home video, video on demand, pay tv. Pour ce faire, DreamWorks Animation a entretenu des liens étroits avec DreamWorks studios. Cette dernière a développé des réseaux nationaux de distribution en salles et home video, et conclu des contrats internationaux de distribution (output deals) avec de nombreuses chaînes de télévision tandis qu’elle a contracté successivement des accords de diffusion mondiale avec les grandes majors - Universal puis Paramount à la suite de son rachat. Toutefois, après le rapprochement entre DreamWorks Studios et Disney, DreamWorks Animation a pris ses distances et demeure de nos jours liés à Paramount
.
Toutefois, l’exploitation de ces imaginaires dépasse largement la sphère audiovisuelle puisqu’ils sont commercialisés dans toutes les industries culturelles, à savoir la littérature enfantine, les comédies musicales et la musique populaire. Par exemple, la maison d’édition Scholastic développe des publications enfantines en anglais et en espagnol qui reprennent les univers du studio
. Outre ce partenariat international, DreamWorks accorde aussi des licences nationales comme par exemple avec Hachette : l’ouvrage Shrek 4 – Monde enchanté piqué métal : la malédiction, l’album du film et le livre de coloriage sont publiés en français chez Hachette Jeunesse Image. En matière de spectacles, Shrek the musical est lancé depuis peu en collaboration avec les troupes Broadway Across America aux États-Unis et Neal Street Productions en Grande Bretagne.
Par ailleurs, ces narrations d’Hollywood sont reprises dans les secteurs des loisirs tels que les parcs à thèmes et les croisières touristiques. À cet égard, Shrek fait l’objet d’une attraction dans le parc Universal Studios à Orlando tandis que le consortium Dubaï Tatweer a entrepris la construction d’un parc à thème inspiré des univers cinématographiques du studio
. Quant aux croisières, Royal Caribbean propose à partir de décembre 2010 des voyages en mer durant lesquels seront organisés les spectacles, les films 3D ainsi que des parades développés par la compagnie. Toutes ces activités s’accompagnent d’un merchandising intense sous forme de jouets, de bibelots, de vêtements griffés et d’articles en tout genre. À titre d’exemple, l’équipe de Jeffrey Katzenberg s’est alliée avec Activision pour les jeux vidéo, Hasbro pour les jouets et Hallmark pour les cartes d’anniversaire.
D’après une stratégie de promotion croisée, les sorties de film donnent lieu à des partenariats divers avec des opérateurs économiques variés qui contribuent à attirer l’attention des consommateurs sur le film tout en bénéficiant de l’association commerciale de leurs productions avec des univers cinématographiques. Pour Shrek 2 (2004), la société a conclu pas moins de 9 accords avec Burger King, Baskin Robbins, General Mills, Mars Incorporated, Pepsi, Frito Lay, Hewlett-Packard, the United States Post Officeet Dial. Au plan mondial, des liens économico-culturels sont instaurés avec des leaders comme Procter & Gamble, Nestlé, Kellogg et Ferrero, et des champions nationaux à l’exemple de Barilla en Italie, Quick en France et Red Rooster en Australie
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Aussi, à l’instar des univers Disney, la culture de la DreamWorks Animation s’est diffusée mondialement autour de symboliques culturelles et commerciales de Shrek et Madagascar. Ces dernières constituent ainsi dans la sphère des loisirs des franchises qui entraînent des rentrées d’argent considérables. Cette réussite marque la fin du monopole de Disney dans la culture enfantine tandis qu’elle révèle des productions en accord avec l’irrévérence et le ton décalé des générations montantes.