Droits sportifs et droit à l’information : un équilibre difficile
Les enjeux économiques de la médiatisation des événements sportifs rendent délicat l’exercice du métier de journaliste et menacent la liberté d’informer.
Les enjeux économiques de la médiatisation des événements sportifs rendent délicat l’exercice du métier de journaliste et menacent la liberté d’informer.
Cet été, les Bleus, le Tour de France ou encore les Jeux olympiques satureront l’espace médiatique. Les chaînes de télévision, les radios et les organes de presse écrite mettent un point d’honneur à traiter l’information sportive. Il faut dire que le sport, par son caractère universel et transversal, touche toutes les couches de la société et de nombreux enjeux de développement lui sont liés : l’éducation, l’économie, les loisirs, la santé, l’environnement... L’audience potentielle et l’intérêt d’un contenu informatif sur le sport ne peut donc être négligée.
Preuve de son attrait, parmi les sujets les plus recherchés sur internet en 2015, une grande partie concerne le sport : du scandale de la FIFA à la Coupe du monde de rugby en passant par le mondial de cricket. Tapez « sport » dans Google et regardez le nombre de résultats.
La tentation de monnayer le droit à l'information est évidenteL’attente du citoyen pour l’information sportive fait bien entendu le jeu des différentes ligues et fédérations. Plus un événement est médiatisé, plus il est facile d’attirer des sponsors en recherche de visibilité. Les stades et les arènes ne peuvent cependant accueillir toute la population journalistique désireuse de couvrir une compétition, en particulier les grands événements comme les Jeux olympiques ou la Coupe du monde de football. L’accès pour les journalistes à une partie de l’information sportive est donc conditionné par les organisateurs d’événements qui « choisissent » ceux qui auront le droit de rendre compte de leurs manifestations. La tentation de monnayer ce droit est alors évidente.
Plus le sport et l’événement sont médiatisés, plus il est difficile d’obtenir des accréditations
« Obtenir des accréditations pour tous les journalistes est une négociation permanente, explique-t-il. Les ligues et les fédérations ont besoin d’argent, mais que cela ne se fasse pas sur le dos de la liberté d’expression et de la liberté d’informer. » Plus le sport et l’événement sont médiatisés, plus il est difficile d’obtenir des accréditations. Sur 489 demandes pour l’Euro 2016, 250 journalistes dont 60 photographes ont obtenu le graal tant recherché.
Les détenteurs de droits de retransmission, eux, négocient directement avec les instances sportives l’accès aux manifestations. Plus un média acquitte de droits, plus son nombre et son niveau d’accréditation seront élevés. Autrement dit, le capital économique d’un média conditionne sa capacité à rendre compte d’un événement et son accès aux sources.
L’extension de la commercialisation d’un droit d’accès à la manifestation sportive reste un danger pour la liberté d’informer du journaliste. Sans contact direct avec le terrain et ses acteurs (joueurs, public…), celui-ci ne peut témoigner avec précision, et en toute indépendance, d’un événement aussi important.
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Françoise PAPA, « L’information sportive : une marchandise ou un droit ? », Les Cahiers du Journalisme, n°11, Décembre 2002
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Fabrice Arfi est journaliste d’investigation à Mediapart. Il a notamment permis de mettre au jour les affaires Cahuzac ou Bettencourt. Loin de prôner une transparence totale en démocratie, il rejette un secret qui menacerait l’intérêt public et étoufferait l’information des citoyens.