Les prévisions caniculaires n’entament pas leur motivation. Ce samedi 18 juin, parents et enfants se pressent dès 9 heures devant le collège Pablo Picasso de Montesson (Yvelines). C’est journée « portes ouvertes » et la classe médias de 3e est sur le pont. Ce matin, une vingtaine d’élèves (sur trente) vont présenter aux visiteurs les projets réalisés au cours de l’année, et animer en direct une émission de radio.
C’est dans une petite pièce que la magie de la radio opère. Entre la machine à café des professeurs et une imprimante 3D, les micros sont fixés à la table modulaire, tout comme la station d’enregistrement. C’est le début de l’émission et Corentin se trouve, comme toujours, à la console. Cléo et Typhène sont, elles, derrière le micro. Une enceinte retransmet l’émission dans la salle attenante qui accueille le public.
Hors-antenne, les élèves sont unanimes : cette année en classe média les a équipés contre la désinformation. « Quand j’ai compris que des fausses informations pouvaient circuler, ça m’a fait bizarre, admet Yuna, et puis ça peut avoir des effets importants sur la société ensuite ». Au-delà de la prise de conscience de ces mouvements, les adolescents disent avoir adopté une posture de recul sur l’information et appris des techniques de vérifications. Plusieurs partagent l’acquisition d’un nouveau réflexe : effectuer une recherche inversée sur les images afin d’en trouver la source. L’option apparaît, sur Google Chrome, avec un simple clic droit sur une photo (« rechercher l’image avec Google Lens »). Un outil utile et simple, rempart à bien des déconvenues. « Je ne m’étais pas rendu compte de l’impact potentiel d’une image utilisée dans un contexte différent de celui où elle avait été prise », témoigne Valentina.
Les élèves racontent recouper désormais leurs informations. Si plusieurs journaux aux lignes éditoriales éloignées évoquent le même évènement, ils font davantage confiance à l’info en question. Sur les réseaux sociaux, si un utilisateur influent partage son avis sur une actualité, ils l’assurent : ils essaient de trouver la source et de comprendre le fond du sujet avant de partager eux-mêmes le post à leurs abonnés. « Le bouche à oreille peut avoir de graves conséquences si on ne fait pas attention, remarque Emmy, il faut être responsable lorsque l’on partage de l’information ».
Plusieurs parents d’élèves de la classe assistent à l’enregistrement, dont ceux de Thomas. Ils l’affirment, l’attitude de leur garçon vis-à-vis de l’information a changé. « Avant on le voyait prendre pour argent comptant toutes les informations qu’il voyait, expliquent-ils. Avec les activités faites en classe, on a pu le voir évoluer. Il nous a donné de bons conseils ! » Pour eux c’est sûr : les enfants peuvent éduquer les parents sur toutes ces questions. Thomas, justement, se promène dans le collège pour interviewer des professeurs. En liaison téléphonique avec le plateau, les entretiens du reporter débrouillard sont diffusés en direct dans la classe.
Sur un mur de la salle défile une rétrospective des reportages effectués, avec des images inédites des coulisses. Les écrans d’ordinateurs affichent des présentations Power Point sur le concept de « classe média ». Calé contre un mur, un fond vert et iPad posé devant permettent aux visiteurs de se prendre pour un mister ou une miss météo.
Ceux qui quitteront bientôt le collège répondent de bonne grâce aux questions des parents d’enfants plus jeunes, intéressés par cette option. Parmi les visiteurs, d’anciens élèves de précédentes promotions de la classe média passent une tête. Toutes et tous le disent : les apprentissages acquis dans cette classe un peu spéciale les aident encore, tant pour leurs prises de parole (nombreux exercices oraux de revue de presse) que pour l’aptitude à travailler en groupe.
Les voici bientôt sollicités par Lionel Vighier, professeur principal et membre de l’équipe pédagogique de la classe média, pour participer à l’enregistrement. Dans cet entretien croisé improvisé, quatre générations de troisièmes médias confient leurs moments préférés. « C’est chouette quand même, non ? », demande le professeur de français, tout sourire, que l’on devine un peu ému. La question est rhétorique : bien sûr que c’est chouette.