La construction d'une société de l'information
Le positionnement de la Russie sur la scène internationale dépendrait largement de sa transition réussie vers une société de l'information
Au début des années 2000, la Russie comptait peu d'infrastructures pour supporter les réseaux d'information et de communication et le pays n'était pas encore engagé sur la voie des nouvelles technologies. Depuis toujours, la Russie doit composer avec deux données problématiques : l'immensité de son territoire (17,1 millions de km²) et une population très importante (142,9 millions d'habitants). La situation est encore compliquée par les différences régionales en matière de traditions religieuses et culturelles, d'héritage historique et d'inégalités économiques. Le pouvoir en place a parfaitement compris que le positionnement de la Russie sur la scène internationale dépendrait largement de sa transition réussie vers une société de l'information. Il a ainsi décidé de faire du développement des technologies de l'information et de la communication (ci-après dénommées « TIC ») une priorité pour les dix années à suivre, en favorisant notamment leur mobilisation dans la sphère publique. L'État russe a décidé de combler le manque de programmes et de politiques en faveur de ce secteur, de développer rapidement les infrastructures nécessaires tout en mettant en œuvre des solutions innovantes. Dmitry Mezensev, président du Comité de conseil sur les politiques de l'information de la Fédération russe, expliquait en 2002 que
la mise en place d'un espace d'information unique était une étape cruciale pour que le pays puisse commencer à construire une société globale de l'information. Dmitry Mezensev précisait que ce projet impliquait le même accès à l'information pour tous les citoyens, indépendamment de leur lieu de résidence, de leurs ressources financières, de leur nationalité ou de leur confession religieuse.
- d'améliorer la qualité de vie de tous les citoyens et d'intensifier le développement des entreprises dans le domaine de l'information
- de développer la gouvernance numérique (e-governance) et d'améliorer l'efficacité des services de l'administration publique
- de développer le marché russe des TIC
- de mettre en place les infrastructures nécessaires à la création d'une société de l'information et de combler la fracture numérique
- de garantir la sécurité dans la société de l'information
- de développer des contenus numériques et de protéger l'héritage national.
Le programme fixe des objectifs ambitieux pour le pays, concernant sa transition vers une société de l'information. Il retient par ailleurs
22 indicateurs qui doivent permettre d'en mesurer la progression. L'un des objectifs du programme est de hisser la Russie, d'ici 2015, parmi les 20 pays les plus avancés
dans leur cheminement vers la société de l'information, et parmi les dix pays les plus performants dans le développement des technologies de l'information sur leur territoire. En 2010, l'
Economist Intelligent Unit avait classé la Russie en 59ème position sur un total de 70 pays, dans une évaluation des capacités à « intégrer les technologies de l'information et de la communication et à les mobiliser à des fins économiques et sociales ». L'étude met en évidence les résultats particulièrement faibles de la Russie en matière de connectivité, d'environnement légal, de vision gouvernementale, de développement des entreprises et d'élargissement de la clientèle. La Russie perd donc des places, puisqu'elle est passée de la
52ème position en 2006 à la
59ème en 2008, une place à laquelle stagne le pays depuis.
Dans le court
rapport de mise en œuvre du Programme pour l'année 2011, le ministère relève, parmi les activités clés qui ont marqué l'année écoulée, le développement de la gouvernance numérique et la mise en place des supports nécessaires pour permettre le paiement électronique dans le cadre des services gouvernementaux, la mise en place d'un système permettant les échanges par voie électronique dans le cadre des procédures bancaires, la
réforme d'une loi sur la signature numérique afin de favoriser son usage dans les relations professionnelles, et enfin l'adoption d'une nouvelle loi concernant la mise en place d'un
système de paiement à l'échelle nationale régissant l'intégralité des paiements électroniques.
Bien qu'il soit trop tôt pour évaluer si les objectifs fixés dans le Programme fédéral sont trop ambitieux (le programme prévoit un premier bilan pour 2015), l'ensemble des initiatives évoquées ci-avant a le mérite de laisser entrevoir une vision gouvernementale plus complète et plus cohérente, où sont identifiés des buts concrets, tous pensés pour conduire la Russie vers un vrai modèle de société de l'information.
En octobre 2011, la Fédération de Russie a participé, à Genève, au salon de l'ITU Telecom World, un événement qui a réuni chefs d'entreprises, chefs d'État et spécialistes du numérique. Sous le patronage du ministre des Télécommunications et des Communications, huit compagnies russes, dont l'opérateur national de télécommunications Rostelecom, ont présenté leurs dernières avancées et conclu des accords commerciaux, répondant de manière positive au slogan « Vers la société de l'information ».
Rostelecom a profité de ce rendez-vous international pour faire le point sur les derniers progrès du modèle russe de gouvernance numérique. L'opérateur télécom a été désigné comme entrepreneur exclusif, dans le cadre du programme « Société de l'information 2011-2020 », pour le développement des infrastructures liées au gouvernement numérique (« e-government »). Igor Schegolev, ministre russe des Télécommunications, a
justifié le choix de Rostelecom en expliquant que l'entreprise disposait du réseau le plus étendu. Rostelecom a lancé le portail de gouvernement numérique
gosuslugi.ru en décembre 2009 et a proposé une version mise à jour du site en mai 2011. Depuis son lancement, le portail aurait enregistré
plus de 150 millions de pages consultées. Contrairement à la première version du site, le nouveau portail est accessible sur tous les supports, y compris les tablettes numériques et smartphones. Il sera également proposé sous peu sur des bornes spéciales, baptisées « infomats » ;
500 terminaux de ce genre devraient être installés sur le territoire russe d'ici 2015. Pour le journal The Moscow Times, le portail doit encore résoudre
deux problèmes importants : la lenteur de chargement de ses pages et des défauts de qualité dans son fonctionnement. Malgré ces points en attente d'amélioration, la Russie semble donner une vraie priorité aux projets destinés à moderniser le pays et à le conduire vers un modèle de société de l'information.