Le journalisme de solutions, révolution culturelle de l'info
De nombreux médias, incités par leurs lecteurs, ont intégré le journalisme de solutions dans leur ligne éditoriale. Et les premiers retours sont très positifs.
De nombreux médias, incités par leurs lecteurs, ont intégré le journalisme de solutions dans leur ligne éditoriale. Et les premiers retours sont très positifs.
Montrer que changer le monde appartient au domaine du possible. Telle est la mission du « journalisme de solutions », appelé aussi « journalisme constructif » ou « journalisme d’impact », et auquel s’est converti début juin le Guardian en lançant sa rubrique « Half Full ». « Ce ne sont pas des "bonnes nouvelles", mais un journalisme constructif, centré sur les solutions et les réponses, sans pour autant les approuver », explique le quotidien britannique. « Si nous publions plus d’exemples de personnes qui essaient de faire des choses inspirantes, peut-être qu’ils pourront aussi nous inspirer à faire un monde meilleur ».
Les lecteurs lisent, partagent et commentent plus les contenus de solutions que les articles " traditionnels "De nombreux autres médias ont investi cette forme de journalisme pour enrichir leur offre éditoriale. Et tous notent l’attrait qu’exercent sur leurs lecteurs les contenus de solutions. Ils les lisent, partagent et commentent plus que les articles « traditionnels ».
« On a trop longtemps considéré le journalisme de solutions comme un journalisme "positif" ou de "bonnes nouvelles" », regrette Gilles Vanderpooten, directeur de la rédaction de Reporters d’Espoirs, l’association française qui promeut une information qui donne envie d’agir, « Mais c’était souvent pour nous décrédibiliser et nous dire que ce n’était pas du vrai journalisme ».
Convaincu du concept, Damien Allemand, le responsable du service digital de Nice-Matin, ne peut qu’acquiescer. Après avoir frôlé la faillite en 2014, le journal a décidé de développer une offre abonnés sur le numérique centrée sur le journalisme de solutions. « Aujourd’hui, on a 6 000 abonnés uniquement sur le numérique », se félicite-t-il, « L’an dernier, on en avait 2 000 ». Le journal publie une trentaine d’articles de solution par mois et de nombreuses vidéos sur leur page Facebook. L’une d’elles, qui présentait une cantine ayant diminué ses déchets alimentaires de 80 %, a été vue 1,7 millions de fois et partagée plus de 30 000 fois sur le réseau social.
« La viralité de ces vidéos est flagrante », explique Damien Allemand, « elles marchent beaucoup mieux que les autres et sont beaucoup plus partagées et commentées ». Même constat pour les articles de solutions : 6 000 vues contre 4 000 en moyenne. « Il y a une véritable attente de nos lecteurs pour ce type de contenu. On reçoit beaucoup de retours positifs », conclut-il, « Et ils sont prêts à payer pour ça ! ». Récemment, le journal a lancé une revue de presse hebdomadaire via une newsletter sur les contenus de solutions et compte créer une rubrique dédiée sur son site.
Le plan anti-gaspillage de l'école François-Jacob à Mouans-Sartoux par le Groupe Nice-Matin
Malgré l’intérêt certain que les rédactions portent au journalisme de solutions, celui-ci reste souvent cantonné à « la bonne idée du jour » ou à des portraits de « héros des temps modernes ». « La solution n’est pas encore intégrée dans l’actualité chaude », explique Gilles Vanderpooten des Reporters d’Espoirs, « Quand on nous appelle, c’est toujours pour donner des idées de sujets magazines ». Les solutions porteuses et les alternatives sont souvent des « signaux faibles », durs à repérer pour le journaliste. « Pendant la crue de la Seine, on aurait pourtant pu parler de la façon dont certaines villes ont fait face à la montée des eaux et les solutions qu’elles ont mises en place ».
Le journalisme constructif ne compte pas supplanter la vision traditionnelle du journaliste "watchdog"Cette approche journalistique se heurte aussi à la vision traditionnelle du journaliste « watchdog », qui doit alerter son public sur les travers de la société. Le journalisme constructif ne compte pourtant pas supplanter cette idée, nécessaire et indispensable. Il souhaite offrir à son public une ressource supplémentaire pour agir.
Depuis la publication, en septembre 2022, de la Charte pour un journalisme à la hauteur de l’urgence écologique, plusieurs médias se sont engagés à former leurs rédactions aux enjeux du climat. Reportage à France Télévisions, où ces formations permettent des rencontres entre journalistes et scientifiques.
L’actuel système économique entraîne le monde vers une catastrophe. La crise des subprimes en aura été l’un des révélateurs. Interview de Paul Jorion, anthropologue, spécialiste de la finance, sur les vérités, « post-vérités » et mensonges de notre temps.