La télévision dans les corons
Du mineur d’Artois aux ménagères bretonnes, la télévision a très vite trouvé sa place dans le salon des Français, et dans leur quotidien. Pourtant onéreux (équivalent au prix d’une voiture), le petit écran n’a pas fait de distinction sociale, de sexe ou de génération. Objet moderne, à la fois inédit et populaire, les Français, même avec peu de ressources financières, n’ont pas hésité à s’en équiper.
Le débat s’est ouvert sur un premier extrait montrant des mineurs interrogés sur la télévision. Nous apprenons que la télévision fait très tôt partie intégrante de la vie de ces travailleurs. Malgré le sacrifice financier, beaucoup sont les heureux détenteurs d’un poste de télévision. Pour Géraldine Poels, à l’évasion ou aux passe-temps que ces mineurs ne peuvent pas s’offrir, se substitue le visionnage de divertissements sportifs, de films ou de reportages sur de lointaines destinations.
L’auteure nous explique également que la télévision a dès ses débuts un fort ancrage régional. En 1952, le premier émetteur régional est installé à Lille. Télé-Lille diffuse les programmes nationaux, mais également des programmes locaux. Elle s’est notamment adressée pendant douze ans (de 1959 à 1972) directement aux mineurs et à leurs familles par l’intermédiaire du Magazine du mineur.
Depuis le début, la
télévision française s’intéresse à son public. Dès les années 1950, les téléspectateurs sont consultés, notamment grâce à des micros-trottoirs. Dans les années 1960, les enquêtes de l’ORTF (Office de radiodiffusion-télévision française) fleurissent pour questionner les téléspectateurs sur la qualité des programmes qu’ils regardent. Loin d’être totalement passif, le téléspectateur devient « expert ».
Les téléspectateurs des années 1960 expriment leur mécontentement : ils réclament davantage de divertissement.
La sociologue Dominique Pasquier est à ce propos frappée par le courrier qui est envoyé à l’ORTF (courrier utilisé par Géraldine Poels pour son étude) : le téléspectateur, mécontent, réclame davantage de divertissement. Pour Isabelle Veyrat-Masson, les attentes du public, friand de divertissement et de variété, contrastent avec le modèle de légitimité culturelle que l’ORTF doit alors incarner.