Le Brésil, 2e producteur de films de la région
En 2012, le gouvernement fédéral brésilien a investi 174 millions de reals (60 millions d’euros) dans la production de 83 films brésiliens. Grâce à cet effort, le Brésil est le deuxième producteur de films en Amérique latine, derrière l’Argentine.
La production de films en Amérique latine
Source : UNESCO Institue for Statistics (UIS), Données 2012
Avec 10,6 % de parts de marché (en nombre d’entrées en salles), le Brésil est le pays d’Amérique latine qui résiste le mieux à la domination du cinéma américain, tout en restant néanmoins sous influence : on trouve ainsi 26 films américains dans le top 30 du box-office brésilien, les productions étatsuniennes concentrent 85 % des recettes en salles et les filiales de distribution des majors en captent 65 %.
Si le Brésil témoigne d’un cinéma national fort en comparaison de ses voisins d’Amérique latine, il convient néanmoins de rappeler que les cinémas nationaux en Europe ou en Asie sont nettement plus présents sur leur marché intérieur.
Source : UNESCO Institue for Statistics (UIS), données 2012
Avec 192 millions d’habitants en 2012, le Brésil est de loin le pays le plus peuplé en Amérique latine. Mais si le réseau de salles brésilien (2517 écrans) est moins alarmant que chez ses voisins d’Amérique du sud, il n’exploite pas le potentiel d’un marché intérieur de cette taille.
Le Mexique, par exemple, possède un réseau de plus de 5000 salles pour 143 millions d’habitants. Avec une moyenne de 1,8 entrée par habitant, la population mexicaine va presque 2 fois et demi plus au cinéma qu’au Brésil. Néanmoins, ce succès de billetterie est surtout porté par les blockbusters américains, les films mexicains n’ayant attiré que 6,5 % des spectateurs en 2012.
L’exploitation de films
Source : UNESCO Institue for Statistics (UIS), données 2012
L’écart est encore plus flagrant lorsqu’il s’agit de la production des films, puisque les deux États principaux captent plus de 80 % des aides accordées. Il est donc extrêmement difficile de produire des films dans d’autres régions au Brésil.
Les aides publiques constituent 95 % du financement du cinéma au Brésil. Pas de préachat des chaînes de télévision (car pas d’obligations), ni de minima garantis versés par le distributeur. En outre, le « Premio Adicional de Renda » et le « Premio de qualidade » sont les deux seules aides non sélectives et déclenchées par de bons résultats en salles (au-delà de 100 000 entrées) ou dans les festivals internationaux (au moins une sélection dans un grand festival international). Or, ces aides ne représentent que
3,6 % du montant total des aides, pour un soutien moyen par film éligible de 120 000 reals, soit 5,7 % seulement du budget moyen d’un film brésilien (2,1 millions de reals en 2012), contre 1,9 million de reals concernant les procédures sélectives financées par le gouvernement fédéral, soit 90 % du budget total des films nationaux.
Cette prédominance des procédures sélectives a pour conséquence de produire des films déconnectés du marché, du public et sans obligation de résultats de la part des producteurs, qui se rémunèrent sur la production du film et quasiment jamais sur sa diffusion. Dans les faits, cela se traduit par un nombre important de films qui ne sont diffusés que sur une ou deux copies (22 films en 2012, soit 26 % de la production nationale), souvent sans distributeur et de façon artisanale.
Par ailleurs, la relative pénurie d’écrans de cinéma à travers le pays laisse peu de place aux films d’auteurs, qui constituent pourtant la très grande majorité des films brésiliens. En effet, pour répondre à la demande du public, les salles diffusent en priorité les blockbusters américains et les quelques comédies grand public nationales. Au Brésil, le label cinéma d’art et d’essai n’existe pas et les aides apportées au secteur de l’exploitation sont attribuées sans distinction entre une salle d’art et d’essai et un multiplexe de 18 salles. Dès lors,
la viabilité d’une petite salle indépendante se révèle extrêmement difficile au Brésil. Ceci constitue probablement la plus grande contradiction du système brésilien, qui soutient majoritairement des films exigeants mais ne développe pas le réseau de salles permettant de les diffuser.
On constate une forte domination des comédies dans la production nationale : en 2012, sept films (dont six comédies) ont concentré 82% de parts de marché domestiques (en nombre d’entrées en salles), pour 20 % des aides. Le cinéma brésilien repose donc entièrement sur le succès de quelques comédies et semble incapable de produire des succès de box-office s’écartant du carcan de la comédie de 4-5 millions de reals de budget.
Parmi les 7 principaux succès nationaux de 2012, 6 étaient des comédies
À l’extrême opposé, les 47 films ayant attiré moins de 10 000 spectateurs en salles (57 % de la production nationale) n’ont rassemblé que 122 000 spectateurs au total (soit 0,6 % de parts du marché domestique), alors qu’ils ont concentré plus de 20 % des aides. Même si cette dépense publique permet de défendre l’indispensable diversité du cinéma brésilien et le renouvellement des talents, la question de l’efficacité de la dépense publique doit être posée face à un tel néant de spectateurs.
Répartition des aides selon le nombre de spectateurs des films
Source : ANCINE/Observatorio do Cinema e do Audiovisual, (OCA), données 2012