Les réseaux sociaux asiatiques
L’Asie constitue un enjeu économique capital pour les réseaux sociaux généralistes. Cependant, les grands marchés de ce continent restent l’apanage d’acteurs locaux. Les acteurs transnationaux du web doivent en effet non seulement faire face à des particularités culturelles fortement ancrées, mais sont de plus bien souvent obligés de négocier leur implantation avec les autorités locales. L’exemple de la Chine, avec ses 200 millions d’utilisateurs de réseaux sociaux, est à ce titre très significatif. Facebook et Twitter y sont bloqués depuis 2009, mais même avant la censure, Facebook avait eu beaucoup de mal à s’implanter à cause du succès que connaissaient les quatre principaux services chinois du secteur. C’est le cas notamment de Qzone qui, selon une étude indépendante, est le réseau social le plus populaire en Chine avec plus de 350 millions de membres, essentiellement des adolescents. Qzone, propriété du groupe chinois Tencent, est affilié à la messagerie instantanée la plus répandue en Chine, QQ, d’où il tire une part importante de ses utilisateurs.
Les réseaux sociaux chinois
De son côté,
Renren est le deuxième réseau social le plus populaire en Chine, prétendant avoir plus de 100 millions d’utilisateurs dans le pays. Créé en 2005 sous le nom de Xiaonei
comme une simple copie simplifiée de Facebook, Renren s’est développé en mettant l’accent sur son offre de jeux en ligne, très prisés en Chine. Le service appartient au
groupe Oak Pacific Interactive, qui est en partie contrôlé par
le géant des télécommunications japonais Softbank. Deux autres réseaux sociaux très populaires en Chine sont
Kaixin001 et
51.com qui correspondent peu ou prou à des groupes sociaux relativement distincts.
Selon l’analyste Kaiser Kuo, alors que le premier est principalement fréquenté par l’élite urbaine des grandes métropoles travaillant pour des multinationales et dans des secteurs considérés comme prestigieux (nouvelles technologies, publicité, communication), le second regroupe essentiellement des cadres intermédiaires en provenance des villes secondaires et des régions rurales. Enfin,
Wretch est le réseau social le plus populaire à Taiwan et
Weibo le clone local de Twitter le plus réussi. L’ensemble de ces réseaux est régulièrement contrôlé par les autorités et activement censuré par leurs propriétaires.
Le Japon est l’un des pays où le pourcentage des utilisateurs des réseaux sociaux parmi les internautes est le plus élevé. Pendant longtemps, le marché japonais a été dominé par des acteurs locaux, principalement
Mixi,
GREE et
Mobage Town,
chacun affirmant rassembler plus de 20 millions d’utilisateurs. Mixi et GREE, créés en 2004, ressemblent davantage à leurs concurrents occidentaux, à ceci près qu’ils sont très orientés vers des usages mobiles, particulièrement développés au Japon. Mobage Town quant à lui est essentiellement une plateforme de jeux en ligne. Mais il convient de noter la montée récente et très rapide de Twitter qui dispose désormais d’un trafic comparable à celui de Mixi.
Selon Nielsen, le taux de pénétration de Twitter au Japon (16 % des internautes),
où il affiche de la publicité depuis 2008, est supérieur à celui qu’il obtient aux États-Unis (10 %). On observe une situation similaire en Corée du sud où la domination des acteurs locaux comme
Cyworld (plus de 18 millions d’utilisateurs revendiqués) est mise à mal par la montée en puissance de Twitter.
Le seul grand pays d’Asie à avoir été conquis par les réseaux sociaux américains, en partie pour des raisons linguistiques, est l’Inde. Malgré l’existence d’une myriade de services locaux (
Bharat Student ,
BigAdda,
Fropper), le réseau social le plus populaire est Orkut dont le taux de pénétration dépasse les 10 % des internautes. Orkut est suivi par Facebook qui est en phase de croissance en Inde. Ce dernier domine également le Moyen Orient et les pays arabophones d’Afrique malgré l’existence d’acteurs locaux comme
As7ab Maktoob, racheté par Yahoo en 2009. Seule exception notable dans cette région : l’Iran. Après le blocage d’Orkut et de MySpace, très populaires dans ce pays, ce sont des acteurs locaux qui ont émergé comme
Cloob, exerçant volontairement une censure pour satisfaire les exigences du régime.
Lors du soulèvement de 2009, Twitter a connu une utilisation croissante de la part des opposants grâce à sa rapidité et sa capacité technique à résister à la censure.