Google : l'acteur influent du Web ?

Google : l'acteur influent du Web ?

Google ne se présente pas. Connue de tous, l'entreprise la plus compétitive du marché est cependant lacunaire sur un terrain : le Web social.
Temps de lecture : 5 min

Le leader mondial sur le web

Google est le leader mondial de la recherche sur Internet et du modèle publicitaire des liens sponsorisés associés aux termes de recherche. La société a été fondée en Californie en 1998 par Sergey Brin et Larry Page, deux étudiants de l’Université de Stanford qui ont développé le célèbre algorithme du moteur de recherche. Leur mission était d'organiser les informations à l'échelle mondiale dans le but de les rendre accessibles et utiles à tous. Cette raison d’être est toujours invoquée à ce jour.
 
Google occupe une place telle à l’ère des nouvelles technologies de l’information que son nom est devenu un verbe courant en plusieurs langues, y compris l’anglais et l’allemand, pour signifier “faire une recherche sur Internet par termes”.
 
Google tire sa réputation non seulement de la qualité des produits et services fournis (moteur de recherche; régie publicitaire pour annonceurs et éditeurs de contenu via ses programmes AdWords et AdSense; cartographie électronique 3D et interactive Google Earth; service de messagerie électronique Gmail; bibliothèque virtuelle Google Books; etc.), mais aussi de la manière dont ceux-ci sont créés et développés. La culture d’entreprise, destinée à nourrir la créativité, la productivité et la loyauté des employés grâce à un environnement ludique et écologiquement responsable, fait figure de modèle dans la Silicon Valley et ailleurs. Equipé notamment d’une capacité d’énergie solaire de 1,6 mégawatts et d’une flotte de vélos et scooters électriques, le campus californien baptisé le “Googleplex” met à disposition des employés des lieux de détente dont quatre clubs de gym et plusieurs restaurants gratuits qui promeuvent des produits biologiques et locaux. Surtout, les “Googliens”, comme on les appelle, ont la liberté de consacrer 20 % de leur temps à des projets qu’ils choisissent librement. Le pari de Google est de cultiver ainsi sa pépinière à idées pour maintenir sa dynamique d’innovation. Depuis 2007, Google figure systématiquement parmi les quatre meilleurs employeurs américains.

Une entreprise compétitive en plein renouvellement ?

Forte de plus de 20.000 salariés dans le monde, Google est une société cotée depuis 2004. En raison de la convergence des technologies et des usages vers le Web, elle a émergé ces dernières années comme le principal concurrent de Microsoft (géant mondial du logiciel également prétendant à la domination du Web) et Yahoo! (pionnier d’Internet mis en difficulté par l’évolution rapide et constante des usages et attentes des internautes). Ces deux derniers ont conclu en 2009 un partenariat destiné à unir leur forces contre Google sur le front du marché publicitaire en ligne.
 
Dans ce contexte compétitif, Google est aujourd’hui à un tournant. L’enfant chéri de la Silicon Valley a enregistré au second trimestre 2010 une baisse de ses bénéfices par rapport au trimestre précédent. Plus de 90% de son chiffre d’affaires est généré par sa plateforme publicitaire qui permet aux annonceurs d’acheter des liens associés avec certains termes de recherche ou avec le contenu de sites partenaires. Or, au terme d’une histoire marquée par des taux de croissance annuel entre 30 % et 40 %, Google se trouve aujourd’hui au sommet de la pyramide avec 85 % du marché mondial et 66 % du marché américain de la recherche. Les projections à long-terme des analystes évaluent désormais la croissance du marché entre 15 % et 17%. Autant dire que les investisseurs guettent avec une anxiété croissante les développements stratégiques qui vont permettre à Google de rebondir et maintenir le taux de croissance auquel ils ont été habitués.
 
Google n’a de cesse d’explorer de nouveaux relais de croissance comme les applications sur le Web pour les particuliers et les entreprises, les bannières publicitaires (avec le rachat de la régie publicitaire DoubleClick pour 3,1 milliards de dollars en 2007), les plateformes mobiles (les premiers téléphones portables dotés du système d’exploitation Android sont apparus sur le marché en 2008), la vidéo en ligne (avec le rachat de YouTube pour 1,65 milliards de dollars en 2006), ou encore la téléphonie sur Internet (Google Talk et Google voice). Certaines initiatives, chapeautées entre autres par sa fondation Google.org et son bras de capital-risque Google Ventures, l’ont entraînée par ailleurs dans des directions inattendues, et encore mal comprises en tout cas par les analystes, telles que les énergies renouvelables, les véhicules “verts” et la biotechnologie.
 
À ce jour, les résultats se font attendre. Le marché des bannières publicitaires est mûr et extrêmement compétitif puisque Google fait face notamment au leader historique Yahoo!.
 
Google Apps est à ce jour une source de revenus négligeable. YouTube, le site de vidéo le plus visité au monde, tarde encore à transformer ses 2 milliards de vidéos vues par jour en monnaie sonnante et trébuchante. Ceci, en dépit des publicités ciblées sur les vidéos, et de l’accord de partage des recettes publicitaires conclu l’an dernier avec Universal Music Group, Sony Music Entertainment et Abu Dhabi Media Company dans le cadre du nouveau site de clips musicaux Vevo.
 
Par ailleurs, si les téléphones Android surpassent déjà l’iPhone d’Apple sur le marché mondial des téléphones mobiles, selon le célèbre cabinet de recherche Gartner, les revenus se font attendre là aussi. Développé en logiciel libre et offert gratuitement aux développeurs d’applications mobiles, Android est le Cheval de Troie planté par Google sur le marché mobile pour tirer parti de la croissance attendue du marché publicitaire mobile (le rachat de la plateforme technologique et régie publicitaire mobile AdMob pour 750 millions de dollars, conclu en mai 2010, est une pièce maîtresse supplémentaire dans la poursuite de cette stratégie). Celle-ci devrait atteindre 43,2 % par an d’ici 2012, selon l’agence géante de marketing interactif ZenithOptimedia.
 
Autre détail digne d’intérêt : les prévisions de ZO concernant la croissance annuelle des recettes publicitaires des réseaux sociaux sont 30,2 %, contre 15,6 % en moyenne pour l’ensemble du marché publicitaire en ligne.

Une dimension sociale lacunaire

De fait, les analystes font valoir que le défi principal auquel Google est confronté désormais, est l’évolution d’Internet vers un Web social. En d’autres termes, le noyau de l’activité des internautes est en train de se déplacer du moteur de recherche, qui a traditionnellement aiguillé l’internaute dans toutes ses pérégrinations, vers les réseaux sociaux. En effet, de plus en plus d’utilisateurs cherchent et trouvent auprès de leurs “amis” les réponses aux questions qu’ils ont posées traditionnellement à l’algorithme de Google. Or là où vont les utilisateurs, là suivent les annonceurs. À ce titre, la véritable menace à l’encontre de Google n’est à craindre ni de Microsoft ni de Yahoo!, dont les modèles d’affaires centrés autour des moteurs de recherche imitent celui de Google, mais bel et bien de jeunes pousses comme Facebook et Twitter. Facebook a réalisé 800 millions de dollars de chiffre d’affaires en 2009, soit le double de 2008. Début septembre 2010, des rumeurs indiquaient que Facebook franchirait en 2010 la barre des 2 milliards de dollars, soit une hausse annuelle supérieure à 100 %. Par contraste, Google a affiché en 2009 une croissance de 8,5 % de son chiffre d’affaires.
 
Google a beau être un acteur extraordinairement influent du Web, il ne dispose guère dans son arsenal d’atout relevant d’une dimension sociale à l’exception de YouTube, un réseau relativement unidimensionnel puisque axé strictement autour du choix et commentaires de vidéos. Les produits et services de Google sont certainement utiles, mais ils ne sont pas véritablement “sociaux”: même la messagerie électronique et la téléphonie sur Internet sont des outils et pas des éléments de fabrication d’un réseau.
 
Face à ces interrogations, Google a laissé entendre que sa réponse est de développer un moteur de recherche de plus en plus intuitif, qui ira non seulement fouiller le Web mais aussi les boîtes de courrier électronique des utilisateurs et la matière grise de leurs réseaux (ciblée en fonction de la question posée). Depuis le début de l’été 2010, les rumeurs abondent aussi sur un projet destiné à concurrencer Facebook—“Google Me” serait le nom de code.
 
Par ailleurs, on peut supposer—sans prendre de risque—que Google manie aussi dans les coulisses sa stratégie éprouvée d’acquisitions stratégiques (voir tableau) afin de se doter des atouts qui lui font défaut. En 2009, le Web a ainsi été secoué un temps par des rumeurs de négociations avancées entre Google et Twitter (les deux organisations ont des liens puisque le co-fondateur et  l'ex PDG de Twitter, Evan Williams, n’est autre que le fondateur de Blogger, un service racheté en 2003 par Google). À suivre...

Données clés

  • Société fondée en septembre 1998 en Californie par Sergey Brin et Larry Page.
  • Chiffre d’affaires annuel : 23 milliards de dollars
  • Bénéfice annuel avant impôt 2009 : 8,38 milliards de dollars
  • Liquidités : 30,1 milliards de dollars au 30 juin 2010
  • Nombre d’employés : 21.805 dans le monde, au 15 juillet 2010.
  • Siège social : Mountain View, Californie
 
  • Part du marché américain de la recherche sur Internet : 65,8 % en juillet 2010 (66,2% en juin) – source ComScore
  • Part du marché mondial de la recherche sur Internet : 84,97 % en juillet 2010- source NetMarketShare (1)
  • Part du marché mondial des liens sponsorisés : 82 % - source: agence d’analyse de marketing interactif Covario
  • Part du marché mondial des téléphones mobiles détenue par Android (suite logicielle mobile développée par Google): 17,2 % au second trimestre 2010--devant l’iPhone (14 %) et derrière le BlackBerry de Research in Motion (18 %) et la plateforme Symbian de Nokia. Sur le territoire américain, Android dépasse l'Iphone avec 28,7% des parts de marché contre 25% pour le système d'Apple et 31,6% pour Blackberry.
Chronologie des acquisitions Google

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