Pour les Gafa, les contenus valent de l'or
Google, Amazon, Facebook et Apple se sont lancés chacun à leur tour dans la production de contenus. Même si leurs objectifs divergent, les enjeux sont colossaux pour chacune de ces plateformes. Analyse.
Google, Amazon, Facebook et Apple se sont lancés chacun à leur tour dans la production de contenus. Même si leurs objectifs divergent, les enjeux sont colossaux pour chacune de ces plateformes. Analyse.
Depuis une décennie, l’arrivée de nouveaux acteurs dans le secteur de la production audiovisuelle a profondément bouleversé à la fois les usages de consommation et l’économie du secteur. Avec ses moyens colossaux et sa stratégie agressive, Netflix concentre la majeure partie de l’attention. Mais désormais, les GAFA (Google, Amazon, Facebook et Apple) font figure de poids lourds de la production audiovisuelle. Ainsi, les investissements d’Amazon en contenus audiovisuels originaux s’élèvent en 2018 à près de 5 milliards de dollars. L’année dernière, le géant du e-commerce s’est par ailleurs offert les droits télévisés du Seigneur des Anneaux, pour la somme de 250 millions de dollars. Avec un coût total atteignant le milliard de dollars, cette adaptation de la célèbre trilogie de J.R.R. Tolkien ne représente pas moins que la série la plus chère de l’histoire. Apple et Facebook ont annoncé, pour leur part, des investissements dans les contenus à hauteur d’un milliard de dollars chacun. Enfin, Google pousse également ses pions, puisque le géant du web propose désormais des contenus originaux via sa plateforme YouTube Premium.
En proposant des contenus audiovisuels spécifiques, les GAFA témoignent du même désir de valoriser l’attractivité de leur plateforme, de leurs services et de leurs produits.En proposant des contenus audiovisuels spécifiques, les GAFA témoignent du même désir de valoriser l’attractivité de leur plateforme, de leurs services et de leurs produits. L’objectif final pour chacune de ces entreprises étant de devenir l’interface universelle pour les utilisateurs d’internet, en proposant un écosystème complet.
Au regard de la saturation du marché des smartphones, Apple cherche à diversifier ses ressources.Or, pour alimenter cet écosystème, Apple a précisément besoin de contenus. En produire est donc une activité connexe destinée à enrichir son cœur de métier d’équipementier. Ainsi, l’un des premiers programmes produits par Apple, Planet of the Apps, était un télé-crochet où des développeurs de programmes soumettaient leur « pitch » d'application mobile à un jury. La plupart des applications présentes sur iOS ayant été créées par des développeurs web extérieurs via des mécanismes d’open innovation, leur consacrer une émission leur permettant de valoriser leurs produits s’inscrivait dans la continuité du modèle économique d’Apple. Une autre raison incitant Apple à se lancer dans l’aventure des contenus est peut-être à chercher dans le talon d’Achille de ce modèle économique : l’essentiel des recettes de la firme, près de 90 %, repose sur les ventes d’iPhone. Au regard de la saturation du marché des smartphones, Apple cherche à diversifier ses ressources.
Quand nous remportons un Golden Globe, cela nous aide à vendre plus de chaussuresdépensent en moyenne deux fois plus que les clients d’Amazon non-abonnés. Il est donc indispensable pour Amazon de chercher à gonfler leurs rangs. Toutefois, depuis décembre 2016, Prime video seul est disponible dans 240 pays. Cette donnée laisse entendre qu’initialement conçu comme produit d’appel, Prime video pourrait connaître le même sort qu’iTuneset devenir rentable en soi.
Le produit en vogue sur les plateformes est la série.la matière, participant à l’émergence du binge-watching et entraînant ses abonnés dans une course folle à la consommation. Les plateformes lui ont emboité le pas et se sont lancées les unes après les autres dans la production de séries : « Ce n’est pas nouveau, mais il y a évidemment un phénomène qui a émergé. Il y a une sorte d’emballement et d’effet d’attraction qui suscite beaucoup d’envie et d’attention » note Benjamin Campion, journaliste et auteur du blog Des Séries et des Hommes, hébergé sur le site de Libération.
En mars 2018, l’agence Reuters leva le voile sur les calculs effectués par la firme. La plateforme se base sur le cost per first stream, soit le rapport entre les coûts de production, incluant ceux du marketing, et le nombre de personnes visionnant le programme en streaming dès la souscription sur leur offre Prime.
Aujourd’hui, les dirigeants d’Amazon ne cachent pas leurs ambitions de dégoter le nouveau Games of Thronesde 63 dollars par abonnés. Et puisque « the lower the better », la série représente un succès commercial pour Amazon. Aujourd’hui, les dirigeants d’Amazon ne cachent pas leurs ambitions de dégoter le nouveau Games of Thrones, preuve que la production de séries créatives et confidentielles n’est plus à l’agenda de la firme.
Quand Netflix produit Marseille, c'est une image que les États-Unis aiment avoir de la France.production d’ampleur internationale, cela peut être une vraie bouffée d'oxygène. Mais s’ils cherchent à faire des produits qui soient visibles partout et notamment aux États-Unis, on risque d'avoir une perte de dynamisme, de diversité et de créativité du marché » alerte Thomas Paris.