Yannick Jadot se lance sur Twitch

© Crédits photo : Capture d'écran chaîne Twitch de Yannick Jadot/Justine Babut

Élysée 2022 : comment Twitch devient une salle de meeting politique

Le candidat Europe Europe Écologie Les Verts Yannick Jadot s'est lancé mi-janvier sur Twitch pour aller chercher les moins de 35 ans sur leur terrain. 

Temps de lecture : 3 min

Mi-janvier, à trois mois du premier tour de scrutin de l’élection présidentielle, Yannick Jadot est devenu le deuxième candidat à se lancer sur la plateforme Twitch, après Jean-Luc Mélenchon. Le leader de la France Insoumise y domine la catégorie politique avec plus de 83 000 abonnés depuis son apparition, il y a deux ans.

Pourquoi maintenant ?

« Parce que nous sommes en campagne présidentielle », sourit Romain Aubert, le responsable de la chaîne Twitch du candidat Europe Écologie Les Verts. D’ailleurs, le jeune homme l’assure, l’équipe a choisi de jouer la carte de la franchise : « Yannick Jadot n’est pas un streamer, il n’est pas question de jouer au faux jeune, on ne veut pas faire semblant, donc nous assumons de venir sur Twitch car c’est une campagne électorale. »

Et qui dit campagne dit besoin d’aller chercher des électeurs. Parler aux moins de 35 ans sur ce genre de plateforme participe à une stratégie globale. Le communicant de Yannick Jadot fait ainsi le parallèle avec les meetings en plein air organisés à Rennes ou à Lille aux heures de pointe par le candidat sur les lieux de passage  ou à « l’assemblée des possibles », une initiative de la campagne qui doit réunir des Français éloignés de la vie politique.

Là où Jean-Luc Mélenchon est l’alpha et l’oméga de sa chaîne, notamment grâce au rendez-vous « Allô Mélenchon » au cours duquel il discute avec des streamers, EELV a installé une série de programmes, à l’instar d’une chaîne de télévision. On y retrouve deux figures de la campagne : Sandrine Rousseau, rivale de Jadot lors de la primaire écolo, le mathématicien Cédric Villani, député et transfuge de LREM, mais également Sandra Regol et Benjamin Lucas, deux nouveaux visages du parti. Et Yannick Jadot dans tout ça ?

Un œil dans les coulisses

Le candidat a fait sa première apparition sur sa chaîne vendredi 4 février pour une séquence de questions-réponses avec des utilisateurs de la plateforme. Plus de quatre-vingt minutes d’échange, jusqu’à 900 personnes en direct simultanément, plus de 2 400 spectateurs sur le live et, à ce stade, une vidéo vue près de 5 000 fois. Des chiffres satisfaisants pour la campagne de Yannick Jadot qui, selon Romain Aubert, est sorti de ce direct « content et avec l’envie de recommencer ».

Le responsable de la chaîne voit, de son côté, des points à améliorer : « Même si nous lui avions dit que le format de Twitch lui permettait de le laisser dérouler le fil de sa pensée, ses réponses étaient sûrement un peu trop longues. Il faut aussi qu’il prenne l’habitude de prendre lui-même les questions qui viennent du tchat pour renforcer l’interactivité. Nous devons travailler sur l’authenticité et qu’il se détende. » Rien de plus difficile que d’être naturel…

Romain Aubert prévient d’ailleurs que si personne ne reprochera à un candidat à la présidentielle de ne pas être sur Twitch, « on vous reprochera d’y être si vous n’embrassez pas les codes ». Et tout cela, sans « jouer au jeune ». Une équation parfois compliquée pour les politiques. On se souvient par exemple de Bruno Le Maire face au youtubeur Hugo Travers lors de la campagne de la primaire de la droite en 2016. Le futur ministre de l’Économie s’aventurait à utiliser un langage qu’on ne lui connaissait pas, jusqu’à lâcher un « Putain, je suis français, c'est la classe ! » qui avait provoqué plus de moqueries que d’admiration.


Le choc des agendas

« Il y une inadéquation entre ce qu’est une campagne présidentielle et la nature même de Twitch, décrypte Jean Massiet, streamer politique sur la plateforme et parmi les pionniers du genre en France. Les candidats sont tout feu tout flamme alors que sur Twitch, se créer une communauté demande du temps, au moins un an, voire dix-huit mois. » Alors que les Français sont appelés aux urnes le 10 avril pour le premier tour de la présidentielle, il risque en effet d’y avoir un choc d’agendas. « La communauté aime créer des relations privilégiées et les politiques ont tendance à les presser comme des citrons, or les gens ne sont pas sur Twitch pour ça, poursuit Jean Massiet. Peut-être que cela peut fonctionner sur TikTok, mais pas ici. » Le créateur de l’émission « Sénat Stream », en partenariat avec la chaîne Public Sénat, met également en garde contre les opérations de communication, peu appréciées des streamers et des internautes en général.

Côté Jadot, on assure que si l’initiative est opportuniste, les discussions existent en interne pour prolonger l’expérience au-delà du 24 avril, jour de second tour, afin de s’installer à long terme sur Twitch. Preuve en est, assure Romain Aubert, la chaîne du candidat écologiste va s’installer dans une pièce spéciale du QG de Yannick Jadot, une façon de « sacraliser » le projet et de « lui accorder une place centrale », assure son responsable. En vue de préparer 2027 ?

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