Une transition compliquée
L'euphorie de la victoire de SYRIZA cède rapidement le pas à l'attente. Alexis Tsipras envoie pourtant un message fort en nommant comme responsable du dossier Nikos Pappas, un proche qui est aussi le numéro 2 du gouvernement. Conformément aux engagements pris lors des premières déclarations, un projet de loi est déposé début mars au parlement pour autoriser la réouverture d'ERT.
Mais les salariés licenciés s'impatientent ainsi que POSPERT, la fédération syndicale des employés non-journalistes qui participe activement au mouvement ERT Open. Celle-ci critique aussi le fait de s’appuyer sur la loi qui avait fondé NERIT pour effectuer une transition en douceur vers le nouvel ERT. «La décision de SYRIZA de garder la structure de NERIT et de se baser là-dessus est correcte, il aurait été difficile de faire autrement, de tout fermer à nouveau», affirme actuellement Nikos Michalitsis, le directeur technique d'ERT.
« Le printemps a été une période d'angoisse », se souvient Christina Siganidou. journaliste à ET3, la troisième chaîne de télévision publique basée à Thessalonique. Les modalités de la réouverture sont alors floues et la date de reprise annoncée fluctue. Les relations sont de plus en plus tendues entre le gouvernement, absorbé par les négociations sur la dette avec l'Union européenne, et POSPERT.
La loi est finalement adoptée par le parlement
dans la nuit du 28 au 29 avril, elle donne aussi le droit au retour à l'emploi pour les salariés licenciés qui avaient un contrat en CDI et qui n'ont pas pris leur retraite depuis 2013.
Au mois de mai, Alexis Tsipras annonce la nomination à la fonction de directeur général de Lambis Tagmatarchis qui a déjà occupé ce poste avant la fermeture. Cette décision passe très mal auprès de l'aile gauche du parti et du mouvement ERT Open. Le directeur est perçu comme un représentant de l'ancien système politico-médiatique qui a mené la Grèce à la ruine.
Le mois suivant, près de 1500 employés licenciés retrouvent leurs postes et entament une difficile cohabitation avec leurs collègues qui ont travaillé pour NERIT. La satisfaction de retrouver un salaire cache difficilement une grande frustration : la réouverture s'est effectuée sans réelle concertation et sans réelle réforme du fonctionnement du service public.
Tout au Nord d’Athènes, le monumental palais de la radio, qui héberge les deux principales chaînes de télévision (ERT1 et ERT2) ainsi que les radios nationales, a retrouvé une certaine effervescence depuis la relancement du groupe. Les trois lettres emblématiques dominent à nouveau l'imposante façade.
« Le combat des employés a réussi, estime George Yioukakis, le nouveau directeur général des radios. La Grèce redécouvre un service public de radio-télévision qui manquait pendant deux ans. Nous avons relancé le même nombre de stations qu'avant : 5 radios nationales et 19 antennes locales ».
Comment s'adresser à la jeunesse grecque alors que le benjamin des employés de la radio a 40 ans ?
Durant les deux ans de fermeture, les activités sont fortement réduites, une partie des locaux est inutilisée, la programmation culturelle est délaissée ainsi que les stations régionales de la radio. « Nous sommes en train de bâtir un nouvel organisme public même s'il est très difficile de repartir de ruines, continue George Yioukakis. La situation actuelle est dure : nous manquons d'effectif, d'équipements et d'argent ». La crise économique impose de nombreuses restrictions budgétaires. Les recrutements sont stoppés et le dirigeant se demande comment s'adresser à la jeunesse grecque alors que le benjamin des employés de la radio a 40 ans.