Introduction
Constituée comme une société multiétatique basée à Caracas au Venezuela, la
Nueva Televisión
del Sur -mieux connue sous le nom de
TeleSUR- est un projet télévisuel qui affiche comme ambition officielle «
l’intégration des peuples latino-américains ». Le projet comprend une chaîne télévisuelle diffusée «
librement par satellite » et un
site Web qui centralise ses contenus multimédia.
La rubrique « El Canal » du site présente TeleSUR comme étant « la seule chaîne d’information 100% latino-américaine, érigée depuis 2005 comme la référence communicationnelle de notre Amérique vers le monde, avec la transmission de contenus informationnels 24 heures sur 24 ».
TeleSUR a commencé à émettre le 24 juillet 2005, date anniversaire de la naissance du
Libertador Simón Bolívar, héros de l’indépendance des pays sud-américains. Dès
l’approbation du projet par le gouvernement vénézuélien en janvier 2005,
TeleSUR se réclame d’un projet « bolivarien », remis au jour par l’administration de Hugo Chávez, lequel a obtenu le soutien de plusieurs chefs d’Etat de la gauche sud-américaine pour la création de la chaîne. TeleSUR associe alors le Venezuela (51 % des actions), l’Argentine de Néstor Kirchner (20 %), le Cuba de Fidel Castro (19 %) et l’Uruguay de Tabaré Vázquez (
10 %) sous la forme d’une société anonyme multiétatique au capital initial de
2.5 millions de dollars. 10 millions de dollars supplémentaires ont été investis en technologie par le biais de la
Corporación Venezolana del Petróleo, entreprise étatique filiale de
Petróleos de Venezuela (PDVSA) .
Figure 1 : Logo et signature de la chaîne TeleSUR
A l’image de son slogan « Notre Nord c’est le Sud », l’émergence de TeleSURest liée à des enjeux d’ordre géopolitique et médiatique. Le projet émerge dans une conjoncture politique caractérisée par la recherche de scénarios d’intégration sud-américaine, au sein desquels un rapprochement des mandataires de gauche aboutit à des initiatives de coopération économique, technique et culturelle à échelle régionale. La création de TeleSUR est ainsi contemporaine de nombreux projets multiétatiques dits « grand-nationaux » menés sous l’impulsion vénézuélienne, tels que l’Alternative Bolivarienne pour les Amériques (ALBA), le Traité pour le Commerce des Peuples (TCP), la Banque du Sud ou le Gazoduc du Sud, entre autres.
Sur le plan médiatique, cette coopération inédite à échelle latino-américaine donne corps au vœu chaviste de « création d’une chaîne de télévision qui diffuse[rait] à travers le monde des informations et des films qui viendraient du Sud ». TeleSUR se donne en effet pour mission d’être «
un média latino-américain à vocation sociale qui s’attache à conduire et promouvoir les processus d’union des peuples du sud. » L’omniprésence du thème du « Sud », défini comme « concept géopolitique qui promeut la lutte des peuples pour la paix, l’auto-détermination, le respect, pour les droits de l’Homme et la justice sociale », sous-tend ainsi l’enjeu médiatique du positionnement de la chaîne par rapport à un « Nord » implicite, représenté à l’échelle globale par des géants multinationaux, à l’image de la chaîne américaine CNN ou de sa déclinaison régionale, CNN en Español. Le projet « pan-latino-américaniste » de TeleSUR entend ainsi rivaliser en audience et en contenus avec un ensemble de chaînes «
oligopolistiques » émettant depuis Atlanta ou Miami leur version « latino ».
Figure 2 : Extrait du site de TeleSUR lors de son lancement en 2006