Un discours sur l’origine et les fondements des inégalités algorithmiques
Les mathématiques dévorent le monde réel : comment reprendre le contrôle des modèles qui, à grande échelle, produisent de l’inégalité ?
Les mathématiques dévorent le monde réel : comment reprendre le contrôle des modèles qui, à grande échelle, produisent de l’inégalité ?
La deuxième partie de la décennie 2010 voit l’algorithme (re)devenir un objet d’attention de premier ordre, atteignant presque simultanément les champs académique, éditorial et médiatique. De manière presque concomitante, en France, la « question des algorithmes » est ainsi à la fois posée par la sociologie du numérique et par la presse grand public, entre une historiographie du salafisme et des conseils pour « libérer son cerveau ». À peine objet d’étude et déjà sujet de société, l’algorithme est à la foi symbole tout trouvé d’une mutation sociale et creuset de toute une série de représentations culturelles, qu’elles soient fictives ou prospectives.
Des industries entières reposent sur ces modèles algorithmiques, maintenant leurs proies dans un cercle infini de vulnérabilitéDes industries entières reposent sur ces modèles maintenant leurs proies dans un cercle infini de vulnérabilité. C’est le cas des redoutables prêts sur salaire (les payday loans, sortes d’avances sur salaire, prêts à très court terme, garantis par des sociétés de crédit) ou de l’éducation à but lucratif, ces lycées et universités for-profit, dont le volume de recrutement, grâce aux « modèles », a triplé entre 2004 et 2014 (plus de 10 % des élèves nord-américains étudient aujourd’hui dans ce type d’établissement).
C’est à l’homme d’embarquer de meilleurs valeurs dans les algorithmes, en créant des modèles qui suivent nos principes éthiquesPuisque les processus prédictifs des big data, en codifiant — c’est-à-dire, en répétant — le passé, n’inventent pas un « nouveau » réel (c’est l’idée qu’ils nous enferment dans une « bulle de filtres », concept théorisé dès 2011), c’est à l’homme d’« explicitement embarquer de meilleurs valeurs dans nos algorithmes, en créant des modèles big data qui suivent nos principes éthiques ».
« Percée » de l'intelligence artificielle, difficultés économiques, développement de formats incarnés, traitement plus transversal des enjeux climatiques... L'Institut Reuters a interrogé plus de 300 dirigeants de médias pour établir ses prédictions pour 2023.