émission sur le rallye Dakar sur la chaîne L'Équipe

Arrivé en 2016 sur la chaîne L’Équipe, Messaoud Benterki est aux commandes de nombreuses émissions en direct dont celles consacrées au rallye Dakar depuis début 2024.

© Crédits photo : Florine Amenta

Rallye Dakar : pourquoi la chaîne L’Équipe succède à France Télévisions

Pour la première fois depuis sa création en 1978, la course change de diffuseur officiel : la chaîne L'Équipe récupère les droits du rallye Dakar, délaissé par France Télévisions. La Revue des médias a assisté à la première émission du canal 21. 

Temps de lecture : 6 min

C'est une grande première : après 45 éditions sur France Télévisions, le rallye Dakar (ancien Paris-Dakar) change de diffuseur. Pour suivre la course du 5 au 19 janvier 2024, le rendez-vous se fait désormais sur la chaîne L'Équipe. Avec ses 778 pilotes et copilotes engagés en catégories autos, motos, quads, camions ou véhicules légers, le rallye dispose d’une couverture exceptionnelle : quatre heures de diffusion quotidienne avec un grand direct de deux heures.

Cette récente acquisition faite par le canal 21 de la TNT a de quoi surprendre. Car du côté de France Télévisions, le budget alloué à la couverture du rallye a considérablement baissé au cours des dernières années, explique Le Parisien. Avec un contrat se terminant en 2026, et toujours selon le quotidien, il était pressenti que la compétition ne serait bientôt plus diffusée sur les chaînes du groupe.

Une nouvelle qui a très vite réjoui la CGT de France Télévisions. Le 12 janvier 2023, le syndicat du diffuseur historique de la course publiait un communiqué dans lequel il affirmait son souhait de ne plus voir le rallye émis sur ses antennes.

« Continuer à faire la promotion de cette épreuve est irresponsable »

Exit la traditionnelle course reliant Paris à Dakar à ses débuts, puis parcourant les déserts d’Amérique du Sud dès 2009, avant de sillonner, depuis 2020, l’Arabie saoudite. Une aberration pour la CGT du groupe public. « En 2023, continuer à faire la promotion de cette épreuve est irresponsable, peut-on lire dans le communiqué de la CGT de France Télévisions. Écologiquement, politiquement et socialement. Comment une entreprise qui prétend agir pour le climat peut-elle en même temps vénérer l’émission de tonnes de CO2 ? »

La mythique course automobile a donc fini par disparaître du contrat liant France Télévisions à Amaury Sport Organisation (ASO), organisateur de la compétition et du Tour de France. Le groupe des chaînes publiques a obtenu ce qu’il souhaitait : conserver la diffusion de la Grande Boucle (l’été 2023, 42,5 millions de téléspectateurs ont suivi le Tour de France), tout en délaissant peu à peu le rallye Dakar. Désormais, la course fait l’objet d’un « Tout le sport spécial Dakar » de dix minutes. France Télévisions compte stopper complètement sa couverture de la compétition dès 2026.

Une marque « iconique »

Les droits du programme ont ainsi été remis sur le marché. « Je me suis battu auprès des ayants droit, détaille Jérôme Saporito, directeur de la chaîne L'Équipe. J’ai précisé qu’on n’est certes pas les mieux placés financièrement, mais qu’en tant que chaîne de sport, c'est dans notre ADN de mettre le paquet en termes d’exposition et de passion. » Le rallye Dakar reste pour la chaîne « sûrement le plus gros investissement pour 2024 ».

Mais alors, pourquoi récupérer les droits de cette course délaissée par France Télévisions ? Pour Jérôme Saporito, « le Dakar est une marque iconique. Ça arrive à un moment de l'année [début janvier] où l’on a besoin plus que jamais de s'évader avec du soleil. Et il y a un côté aventure humaine qui reste l'essence même de la course. Je ne pense pas du tout que ce soit une course ringarde. Bien au contraire, c’est une marque forte et une aventure qui n'a pas perdu ses lettres de noblesse depuis quarante ans. »

« Pour les négociations, il a suffi aux équipes de prendre l’ascenseur »

Le directeur de la chaîne avance aussi son argument phare : le caractère « cocorico très assumé ». Chez L’Équipe, les nouvelles disciplines diffusées le sont souvent parce qu’un athlète français a la possibilité d’y briller. Avec le Dakar, tous les yeux sont rivés sur Sébastien Loeb, vainqueur du championnat du monde des rallyes (WRC) neuf fois consécutives et participant pour la huitième fois à « la course la plus dure du monde ».

Pour les négociations, il a suffi aux équipes de prendre l’ascenseur de leurs locaux situés face à la Seine, à Boulogne-Billancourt : le groupe ASO est propriétaire de L'Équipe. « On est au troisième étage d'un immeuble et ils sont au sixième. Mais pour eux, on a été un client comme un autre, il n’y a pas de passe-droit, il a fallu convaincre et discuter, présenter nos projets. » Le directeur de la chaîne ironise : « Si c'était juste parce qu'on est cousins que la chaîne L'Équipe récupère les droits d’ASO, alors je serais très heureux de vous annoncer que l’on va diffuser le Tour de France. »

Dakar vs biathlon

Dans ce même bâtiment, un nouveau décor d’émission a été installé. Grâce à d’immenses écrans, le petit plateau du rez-de-chaussée accueille les tournages de nombreux directs, mais aussi ceux de « L’Équipe de Greg », « L’Équipe du soir », et désormais l’émission dédiée au Dakar.

Le 5 janvier, pour le premier jour de la course, toute l’équipe a découvert ce plateau, enchantée du résultat. L’occasion aussi pour chacun de faire connaissance. « On a fait des réunions à distance, mais on ne s’est rencontré que ce matin avec les consultants, confie le présentateur, Messaoud Benterki. Tête d’affiche de la chaîne, il est accompagné de Cyril Despres, cinq fois vainqueur du Dakar, et de Ludivine Puy, ancienne participante au Dakar dans la catégorie moto. La direction tenait à avoir de la mixité à l’antenne, mais aussi des consultants « crédibles aux yeux des téléspectateurs, qui ont des connaissances et de l’expérience, mais surtout qui ont envie de partager. »

Aux commandes de ce nouveau rendez-vous durant deux semaines, Messaoud Benterki est connu du public comme « Monsieur biathlon ». Entre les émissions du Dakar, il continue de lancer les directs consacrés au sport d’hiver. « Aller d’un événement à l’autre, l’aspect découverte d’un sport, j’adore ça ! Ça oblige aussi à identifier ce qui fait le charme d’une discipline, ses enjeux et faire vivre le dispositif comme il se doit. »

« En temps normal, le public est quasiment deux fois moins nombreux »

Pour celui qui a par ailleurs présenté les 24 heures du Mans, le Dakar est un « super challenge ». Le journaliste compte bien garder la patte de L’Équipe, avec « [sa] façon de faire, en mettant en avant les coulisses et les personnages, tout en restant accessible au grand public. » Et pour que les amateurs du rallye Dakar puissent garder leur routine de visionnage, la chaîne a conservé le créneau « historique » de 20 heures-21 heures. « On se base sur les habitudes et on essaie d’en créer des nouvelles comme avec l’émission entre 12 heures et 14 heures », détaille Jérôme Saporito.

Mais dès la première, le 5 janvier, la programmation du midi est modifiée. Un changement de date d’un sprint de biathlon oblige L'Équipe à raccourcir son émission consacrée au Dakar. Celle-ci commence plus tard, quitte à rater les départs du rallye. « Le biathlon, c'est un peu notre or. On doit avant tout être à l’écoute de ce qu’il se passe avec cette discipline », explique Jérôme Saporito.

Après trois jours de diffusion, le directeur de la chaîne s’estime satisfait des premiers résultats d’audience. Selon lui, plus de 500 000 téléspectateurs étaient au rendez-vous le premier vendredi puis le samedi. En temps normal, le public est quasiment deux fois moins nombreux le vendredi soir sur le créneau de 20 heures à 21 heures. « De manière générale, les sports automobiles sont quelque chose qui nous intéresse, on sent qu’il y a une appétence du public. »

Preuve en est, fin 2023, L’Équipe a annoncé la prolongation de ses droits de diffusion des 24 heures du Mans. La course mythique restera au moins jusqu’en 2025 sur le canal 21.

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