La solution viendra-t-elle de la rue ?
Les actions de protestation ont été d’abord initiées au sein même des médias publics polonais, les premiers concernés. Ainsi, le 7 janvier dernier, le jour de l’entrée en vigueur de la « petite » loi sur les médias, les directeurs de toutes les antennes de la télévision publique polonaise ont démissionné en guise de protestation alors que
Jedynka, la première – et principale - chaîne de la radio publique polonaise a fait retentir toutes les heures sur son antenne les notes de l’hymne polonais en alternance avec l’
Ode à la joie. Quant au directeur de la première chaîne de la radio publique polonaise Kamil Dabrowa, celui-ci, avant de quitter ses fonctions, a admis publiquement que la prise de contrôle ouverte des médias publics polonais par un parti au pouvoir résulte de négligences persistantes depuis la chute du régime communiste puisque, durant 26 ans, la société polonaise a toléré, sans broncher, que les médias publics fassent constamment l’objet d’une instrumentalisation politique par le partis de gouvernement successifs.
Mais les agissements du gouvernement actuel ont aussi fait réagir de nombreux Polonais, toutes générations confondues, qui se disent choqués et abasourdis, osant à peine croire leurs propres yeux devant les réformes de l’État réalisées par le nouveau gouvernement en un temps record.
Un certain sentiment de culpabilité est même perceptible au sein de la classe moyenne urbaine, qui compte le plus d’opposants du PiS, surtout parmi ceux qui, déçus par le gouvernement des libéraux précédemment au pouvoir, et qui avait laissé de pans entiers de la population polonaise au bord du chemin de la croissance économique, ne sont pas allés voter aux dernières élections législatives. Ce sont eux qui, en premier lieu, participent aux marches publiques organisées à travers tout le pays depuis le 9 janvier dernier pour protester contre l’ingérence du gouvernement dans le fonctionnement de la justice et l’étatisation programmée des médias publics. Ces manifestations, organisées par le KOD, Comité de défense de la démocratie, un mouvement civique constitué à l’occasion et qui se réclame du KOR, Comité de défense des ouvriers, à l’origine de l’opposition démocratique en Pologne sous le régime communiste, ont eu lieu dans différentes villes du pays avec des slogans ridiculisant le parti du gouvernement tels que « Seigneur, rendez-nous les médias libres ».
Les marches de protestations dénonçent la « poutinisation » de la Pologne
Les marches de protestations dénonçant la « poutinisation » de la Pologne tout en appelant au boycott des médias publics et organisées, cette fois-ci, contre la surveillance renforcée des citoyens sur Internet, prévue dans la modification de la loi sur la police, ont rassemblé quelques milliers de personnes dans une quarantaine de villes du pays mais aussi à l’étranger : à Paris, Londres, Berlin ou encore Melbourne, le samedi 23 janvier. À Varsovie, on a comptabilisé environ 10 000 manifestants, parmi lesquels des Hongrois venus mettre en garde les Polonais contre les effets néfastes de « l’orbanisation » de la vie publique. Ces manifestations, qui permettent de mesurer l’attachement des Polonais aux principes du fonctionnement de l’État de droit ont fait réagir, entre autres, le réalisateur Andrzej Wajda. Celui qui a accompagné par ses films la lutte des Polonais pour la démocratie et la liberté de parole dans les années 80, a constaté qu’aujourd’hui, c’est le bon sens qui fait sortir les gens dans la rue.
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Crédits photos :
Polish Prime Minister Beata Szydlo in plenary debating the situation in Poland. European Parliament /
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