L'analyse du graphe de #TellEurope
La première tendance qu’on observe dans le graphe de #TellEurope est que les différences et les affinités politiques se reflètent clairement dans la structure des échanges qui ont eu lieu sur Twitter, une tendance constatée aussi dans d’autres contextes. Comme montre le graphe ci-dessous, chacun des candidats voit une communauté distincte se former autour de son compte officiel.

Les points correspondent aux comptes Twitter ayant écrit un message comportant le hashtag #TellEurope entre 20h20 le 15 mai et 9h51 le 16 mai 2014 (total de 30 000 tweets). Les lignes entre les points représentent les interactions entre ces comptes (RT et mentions). La topologie du graphe est le résultat de l'intensité de l'interaction entre les comptes. Le plus deux comptes sont caractérisés par une communication bidirectionnelle intense entre eux, le plus ils sont proches sur la carte. La taille des points (du plus petit au plus grand) dépend du nombre de RT et mentions reçus. La couleur dépend de la communauté à laquelle ils appartiennent. Source : ephemeron.eu, image sous licence Creative Commons.
La structure des interactions au sein du réseau reflète la particularité de la communauté d'Alexis Tsipras par rapport à celles des autres candidats. En effet, bien que les quatre communautés (Schulz, Keller, Verhofstadt et Juncker) soient assez proches et reliées les unes aux autres de manière relativement équilibrée, la communauté de Tsipras, plus isolée, interagit seulement avec celles de Schulz et de Keller. Simultanément, la communauté de Tsipras s’associe fortement avec un autre groupe important, au sommet du graphe en rouge, dont les membres les plus actifs sont des utilisateurs grecs. Cela signifie que la mobilisation des Grecs sur Twitter était beaucoup plus importante que dans les autres pays, chose compréhensible si l'on prend en compte l'intensité de la campagne et l’importance des enjeux de l'élection en Grèce.
Source : Topsy
En effet, la liste ci-dessus montre clairement que la participation la plus intense à la discussion est venue des pays du Sud comme l'Espagne, la France, la Grèce et l'Italie. Ce sont précisément les pays européens où le débat sur les politiques économiques au sein de l'UE est le plus intense. En revanche, il y a eu peu d'intérêt pour l’événement en Allemagne et encore moins aux Pays-Bas, en Grande-Bretagne, en Scandinavie et en Europe centrale et orientale. Le fait que la Grèce ait la plus petite population des utilisateurs de Twitter parmi les quatre pays les plus actifs sur #TellEurope, confirme la sur-participation des Grecs à la discussion. Même si ces données doivent être maniées avec précaution en raison des difficultés inhérentes à la géolocalisation, ils coïncident avec les résultats de l’analyse de réseau.
La bonne prestation d'Alexis Tsipras ainsi que la présence dynamique des utilisateurs grecs explique le fait que celui-ci était le candidat le plus commenté sur Twitter, comme en témoignent les données communiquées par l'UER à travers la société Vigiglobe.
Source : Vigiglobe
Aussi Tsipras et Ska Keller sont les candidats qui ont récolté les commentaires les plus positifs de la part des journalistes et des observateurs et ont constitué en quelque sorte
les « révélations » du débat. Ceci est confirmé par le fait que la part proportionnelle de citations de ces deux candidats a fortement augmenté sur Twitter le matin du 16 mai, comme indiqué dans le tableau ci-dessous, ce qui correspond à la couverture médiatique du lendemain du débat et à la discussion qui a suivi.

Le succès de Tsipras, et dans une moindre mesure celui de Keller, est remarquable parce que leurs rivaux, issus des formations politiques puissantes, disposent des ressources beaucoup plus importantes qu'ils mettent en œuvre pour accroître leur influence en ligne. Par exemple, Schulz et Juncker disposent d’un personnel professionnel, aidé par des sociétés spécialisées, pour assurer la gestion de leurs profils sur les réseaux socionumériques. Ils ont également déjà fait des
campagnes publicitaires notamment sur Twitter ce qui leur a permis d’augmenter leur nombre de
followers. A contrario, la campagne de Tsipras sur le web est beaucoup plus « artisanale » et
low cost.