Il est temps de poser la question des algorithmes
Le sociologue Dominique Cardon plaide pour une meilleure compréhension des enjeux politiques des algorithmes.
Le sociologue Dominique Cardon plaide pour une meilleure compréhension des enjeux politiques des algorithmes.
L’actualité, avec l’affaire Volkswagen, énième bidouillage algorithmique, le remplissage de nos rues de voitures noires grâce à Uber, ou le changement de notre rapport à l’attention, nous rappelle combien nos vies sont médiées par quelques lignes de code et formules mathématiques. Et combien ces dernières ont un impact on ne peut plus concret sur nos activités de tous les jours, même lorsque nous ne sommes pas consciemment connectés.
Ce qui n’est pas récent, par contre, c’est le talent de Dominique Cardon à poser des cadres, à faire fonctionner des représentations brillantes de nos usages numériques. En 2008, son article « Le design de la visibilité : un essai de typologie du web 2.0 » avait marqué les esprits et frappé ceux qui voulaient comprendre la variété des pratiques qui se déployaient dans ce nouvel espace. Il y proposait un cadre de représentation et d’analyse de nos usages sociaux sur les plateformes du web 2.0.
Dominique Cardon s’intéresse aux algorithmes qui entretiennent un rapport à nos vies
Cette thèse, pour autant, n’est pas démontrée. La tâche est sans doute impossible : comment expliquer ou caractériser ce que produisent les algorithmes sur nos vies ? Ces programmes ont-ils un pouvoir ? Jusqu’à quel point cette société en réseaux qui se dessine est-elle le produit de volontés individuelles ou le produit de l’architecture proposée par les algorithmes des réseaux ? Il est certain que l’auteur aborde là une vraie question : l’accompagnement de l’individualisation de la société avec sa nouvelle expression qui en prend la forme. Il reste qu’aucune démonstration n’en est faite.
L’ambition et l’intérêt de ce petit livre sont pour autant essentiels. La partie véritablement intéressante est l’ouverture sur cette quatrième catégorie, celle des algorithmes qui auto-apprennent, qui se nourrissent de traces et qui ont l’ambition de prédire, et non uniquement d’analyser. C’est là que se loge le génie numérique, et que s’ouvre un champ nouveau.
L’algorithme a un pouvoir et une autonomieC’est là que le machine learning est en train de créer de nouveaux fonctionnements, où l’algorithme a – enfin ? – un pouvoir et une autonomie. Sans entrer dans les modes de formation de l’intelligence artificielle ni interroger le futur des algorithmes autonomes, auto-apprenants, il en dessine le fonctionnement et la logique, et peut-être le début d’un imaginaire, parce que ces algorithmes là en sont dotés.
L’intelligence artificielle promet de révolutionner l’organisation du travail dans de nombreux milieux, y compris dans les médias. Ils s'y sont d'ailleurs déjà adaptés. Exploration de cinq cas de figure, de l’illustration des articles à l’analyse de documents.