les troisième de classe média analysent une image avec des loupes

© Crédits photo : Illustration : Sophie and the Frogs

Comment décrypter une image : les troisième apprennent à déjouer les pièges

Dans le contexte de la guerre entre la Russie et l’Ukraine, les élèves de la classe média travaillent sur les images. Sources, prises de vue, compositions, cadrages : les adolescents explorent les questions à se poser devant une photo.

Temps de lecture : 3 min

Corentin et Thomas s’avancent vers le tableau au fond de la salle. Nous sommes le vendredi 15 avril, il est 9 h 30, l’entrain est modéré. Les deux élèves de la classe média du collège Pablo Picasso de Montesson inaugurent la séance de veille du jour. Les consignes : présenter et expliquer la nature du document, donner la source, décrire le point de vue de la publication, développer les « cinq W » du journaliste (When, What, Where, Why, Who) et ainsi de suite. Les élèves peuvent aussi, petite nouveauté, présenter des publications vues sur les réseaux sociaux.

C’est une publication de la BBC sur Instagram que Thomas a choisie pour évoquer le comportement de la Russie dans le conflit. L’élève suit la trame de l’exercice, donne les différentes informations nécessaires à la compréhension du post. La présentation de la source est plus floue : « Getty, une entreprise internationale », explique-t-il. Il estime que la publication est subjective, car elle cite les raisons invoquées par le chef d’état russe pour envahir son voisin.

Au tableau, Corentin présente lui aussi une publication Instagram du ministère des affaires étrangères ukrainien. Son sujet : les accusations de viols commis par des soldats russes contre des Ukrainiennes. Dans un premier temps, Corentin estime que l’information donnée par ce compte est objective. « Elle donne des faits », justifie-t-il. « Il ne faut pas oublier que l’Ukraine est partie prenante dans le conflit, explique le professeur de français, Lionel Vighier. Il faut être prudent sur ce qui est dit. Non pas que ce soit faux, mais nous n’avons pas d’information sur les méthodes d’enquête et les sources. » But de l’exercice : expliquer aux élèves l’importance de la contextualisation des informations… et notamment des images. C’est d’ailleurs l’objet de la séance de l’après-midi.

Les élèves reviennent tout juste de leur pause déjeuner, et Lionel Vighier aborde en premier lieu la question des sources. Les photos peuvent être prises par des journalistes, pour des médias ou des agences de presse... Mais aussi « par des gens comme nous », explique Yuna, au premier rang.

Le professeur s’intéresse ensuite au regard du reporter. Il diffuse des extraits d’une interview de Laurence Geai, photojournaliste en première ligne en Ukraine. Interrogée le 25 mars par Adèle Van Reeth pour « Les Chemins de la philosophie » sur France Culture, la reporter donne quelques clés de son travail. Il est nécessaire pour elle de bien comprendre ce qu’il se passe avant de prendre une photo. Laurence Geai discute donc avec les populations sur place. Une fois son appareil en main, et même si elle ne fait pas de la photo artistique, la reporter pense à la composition de ses clichés, afin qu’ils soient lisibles et marquants.

Phénix

Une fois ces deux points abordés et discutés, les élèves se répartissent en groupes. Leur mission : trouver les différentes informations sur une photo qui leur a été donnée, la décrire et l’analyser, tout en expliquant leurs démarches. Plusieurs clichés montrent les dévastations causées par les combats. Sur d’autres, on voit l’irruption brutale de la guerre dans le quotidien des Ukrainiens. Les élèves réussissent dans l’ensemble à trouver tous les renseignements demandés, et montrent même une certaine agilité dans cet exercice.

Le travail d’analyse est moins évident. Les collégiennes et collégiens hésitent, à plusieurs reprises, à s’exprimer franchement. Comme s’il y avait des bonnes et des mauvaises réponses. Mais au fur et à mesure, les langues se délient. Devant le cliché d’un cycliste passant à côté d’un incendie monstrueux, Maëva voit la figure d’un phénix qui surgit au deuxième plan de la photo. La question de la technique est également évoquée par l’adolescente : comment a-t-on pu capter aussi bien l’explosion de cette tour de communication ? On comprend rapidement qu’il s’agissait non pas de la première, mais de la deuxième déflagration.

Alors que la séance approche de sa conclusion, de nombreuses questions font surface. Une photo peut-elle être objective ? « Non, car des choix d’angle sont faits », explique Emy. Il n’y aura, malheureusement, pas de temps pour aller plus loin… en tout cas aujourd’hui, car les élèves continueront à travailler sur l’analyse d’images durant leurs prochaines séances.

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